Dans un bus à Bucarest. (AFP)

Du chauffage, pas des promesses!

En pleine crise économique, sans gouvernement depuis mi-octobre, les Roumains vivent difficilement, parfois sans électricité. Et pendant que les politiques se disputent, le fossé se creuse avec les autres pays de l’UE, s’alarme l’éditorialiste du quotidien Adevărul.

Publié le 22 octobre 2009 à 12:39
Dans un bus à Bucarest. (AFP)

J'allume la télé. Désastre ! Des images des écoles de la ville de Brasov [en Transylvanie] : les petits, emmitouflés jusqu'aux oreilles, grelottent dans les classes. Le chauffage a été coupé à cause des dettes. Et personne ne semble s'en soucier ! Le thermomètre installé dans une salle par un journaliste indique 12° Celsius. Une mère ne prévoit plus de sandwiches pour le goûter de son fils mais ... du Nurofen [selon une étude récente, les écoliers roumains âgés de 8-9 ans sont dépressifs et blasés].

Un autre reportage : à l'hôpital de Zlatna [également en Transylvanie], les radiateurs n'ont plus donné signe de vie depuis l'année dernière. Ils sont aussi froids que les patients qui partent d'ici vers un monde meilleur. Ceux qui résistent encore adoptent la position fœtale sous trois couches de couvertures. Dans les salles, la température n’est que de deux à trois degrés plus élevée qu'à l'extérieur. Une dame, ronde à cause de tous les vêtements qu'elle a sur le dos, se plaint d'être venue ici avec une maladie et de repartir avec une autre...

Mais ce ne sont pas les gros titres du journal télévisé. Ce sont les dernières nouvelles, les "faits divers". Les dix premières minutes sont consacrées à Basescu-Geoana-Antonescu-Oprescu-Croitoru-Iohannis [le président roumain et les principales personnalités politiques du moment]. Pensez-vous que ces personnes ci-dessus, pour lesquels la tremblote est déjà devenue un réflexe inconditionné, puissent se "réchauffer" aux promesses, balivernes, et autres stratégies politiques ? Ils ont besoin de solutions urgentes. Maintenant, pas l'année prochaine. Aujourd'hui, pas demain. Sinon, "la Roumanie abondante" d'après-demain pourrait ne plus les trouver à la surface, mais au sous-sol...

A des années-lumière de la Finlande

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Et malheureusement, ce sont eux la Roumanie réelle, une Roumanie réelle si loin de cette Europe à laquelle nous sommes tellement fiers d'appartenir. Je change de chaîne. Sur CNN, une nouvelle qui me laisse bouche bée : "La Finlande est devenue le premier pays au monde à déclarer l'accès à l’Internet à haut débit comme un droit légal de ses citoyens. A partir de juillet 2010, les sociétés de télécommunication seront obligées de fournir à tous les Finlandais des connexions Internet avec une vitesse d'au moins 1 mégabit par seconde". Nous pensons que "dans la société moderne, on ne peut pas vivre sans Internet. Une connexion est aussi nécessaire que les services bancaires, l'eau ou l'électricité", a déclaré un officiel finlandais. C'est aussi l'Europe. C'est aussi en 2009 ! A combien d'années-lumière se trouve la Roumanie ?

Sommes-nous dans une autre galaxie ? Eh bien qu'ils viennent chez nous pour qu'on leur apprenne comment vivre sans eau, ni électricité, ni chaleur ! Ceux qui voient un sauveur de la nation dans l'Allemand Klaus Johannis, maire de la ville de Sibiu (ancienne capitale européenne de la culture) et possible futur Premier ministre d’une coalition entre le Parti social-démocrate, le Parti libéral et l’Union des hongrois (UDMR), se trompent. Ce n'est pas avec une fleur qu'on fait le printemps, et on ne change pas un pays avec un Allemand. Peut-être avec quelques centaines de milliers, qui remplaceraient les fonctionnaires actuels. En fait, vous savez quoi ? Pour être sûrs, il nous en faudrait quelque 22 millions...

CONTEXTE

La guerre des Premiers ministres

Le 13 octobre, le Parlement roumain a provoqué la chute du gouvernement d’Emil Boc. Le maire de la ville de Sibiu, Klaus Johannis, a été désigné chef de gouvernement par le Parlement, tandis que le président Traian Basescu a chargé un technocrate, Lucian Croitoru, de former un gouvernement. "Le nouveau gouvernement est attendu pour le 23 octobre, mais il y a de fortes chances qu’il ne reçoive pas l’aval du Parlement", prévient Romania Libera.

Cette situation pourrait aggraver la crise économique que traverse le pays, car le Fonds Monétaire International, qui n’a plus d’interlocuteur, a retardé un virement de 3,5 milliards d’euros prévu pour fin octobre. Mais le bras de fer entre député et président risque de durer jusqu’au 22 novembre, date de l’élection présidentielle.

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