2012 ne peut pas être pire que 2011

L'année 2011 a été tellement mauvaise pour l'Europe que 2012 ne devrait qu'être meilleure. Mais après avoir survécu à une crise sans précédent, ce sont les tensions sociales que celle-ci a provoquée qui menacent l’Union, estime l'éditorialiste de Gazeta Wyborcza Jacek Pawlicki.

Publié le 3 janvier 2012 à 15:38

L'an passé s'est achevé avec la plus grande crise dans l'histoire de l'Union et avec l'isolement délibéré de l'un de ses membres, le Royaume-Uni, qui s'est opposé à tout changement dans les traités de l'UE afin de renforcer la discipline budgétaire.

En novembre 2011, les responsables politiques et les experts ont, pour la première fois, évoqué ouvertement la possibilité d’une sortie de la zone euro de l’un de ses membres, la Grèce, dont le sauvetage a englouti des milliards d'euros, et presque toute l'énergie de l'Union. Sans compter ses démêlés avec l'Italie, qui se sont heureusement soldés par un happy end, avec le départ de Silvio Berlusconi, remplacé comme Premier ministre par le technicien Mario Monti.

Chez nos voisins du Sud, les révolutions arabes ont renversé les régimes dictatoriaux sans toutefois, pour l'heure, apporter beaucoup plus de démocratie en Libye, en Egypte, ou en Tunisie. Bien que l'Union européenne n'ait pas été submergée, comme elle le craignait, par une vague de réfugiés, le problème de l'immigration demeure constant dans une Europe qui a très peu à offrir à ces démocraties émergentes.

De la même manière, tout reste à accomplir concernant l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine, dont la signature, initialement prévue pour le sommet UE-Ukraine de Kiev de décembre dernier, a été finalement suspendue en raison de l'emprisonnement de l'ancienne Première ministre Ioulia Timochenko. Du côté de la Biélorussie, l'Union n'exerce guère d'influence sur le président Alexandre Loukachenko, qui condamne régulièrement ses opposants.

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Concernant ces deux pays, l'Union, ainsi que la Pologne, attachée tout particulièrement à un rapprochement avec les voisins orientaaux, ont bel et bien échoué. L'Europe manque de vision pour sortir de l'impasse, alors que la Russie, occupée à reconstruire son empire, ne perd pas son temps.

Un grand Schengen et une petite Union

Au printemps, on assistera peut-être à l'élargissement de l'espace Schengen. Juste avant Noël, les Pays-Bas ont en effet retiré leur veto contre l'élargissement de la zone de libre circulation à la Bulgarie et à la Roumanie. Ces deux pays y entreront donc, à condition toutefois que les deux prochains rapports de la Commission européenne sur l'état du système judiciaire et sur les réformes en matière de politique intérieure, soient positifs. Sofia et Bucarest, membres de l'UE depuis 2007, doivent donc multiplier leurs efforts.

Quant à la zone euro, elle voit naître dans son sillage une union fiscale plus étroite, et bien que les responsables politiques réfutent dur comme fer l'hypothèse d'un éclatement de l'Europe, tout peut arriver.

Les premiers mois de cette nouvelle année se passeront sans doute à chercher l'argent pour alimenter le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et à négocier un nouvel accord intergouvernemental. Le groupe de travail qui rédige les termes du pacte fiscal réunit à la fois les représentants de la Pologne (qui reste en dehors de l'euro, mais souhaite faire partie du pacte en question) et du Royaume-Uni (qui a boycotté l'accord). La vision de tout ce monde assis à la même table rend plutôt optimiste.

De bonnes nouvelles proviennent également de la Croatie, qui organise le 22 janvier un référendum sur son adhésion à l'Union. Malgré l'inquiétude ambiante, due à la situation économique, la majorité des Croates dira oui à l'Europe et la Croatie sera, en juillet 2013, le 28ème pays de l'UE. L'Union gagnera ainsi un nouveau membre venu des Balkans (dont le trou noir géopolitique continue à la hanter).

Combien allons nous empocher ?

Le combat autour des fonds de cohésion va se jouer au cours des négociations budgétaires, qui, après la phase d'échauffement lors de la présidence polonaise de l'UE, vont maintenant commencer. Il n'est pas exclu que dès le début de l'année, les contributeurs nets au budget communautaire, à savoir le Royaume-Uni, l'Allemagne, la France, la Suède, la Finlande, les Pays-Bas et peut-être d'autre pays membres, exigent une réduction substantielle de leur contribution.

Ce dont on peut se réjouir, c’est que les négociations budgétaires seront dans les mains des Danois, qui président l'Union depuis janvier. C'est déjà la septième présidence du Danemark, après celle de 2002, au cours de laquelle les Danois ont finalisé les négociations d'adhésion entre l'UE et les dix pays de l'Europe centrale et orientale. Ils ne manquent ni de bonne foi, ni d'expérience. De plus, en tant que Scandinaves ils sont connus pour leur approche très pragmatique de la politique.

Malheureusement, le pragmatisme danois peut se heurter à l'approche française de la négociation budgétaire. D'autant plus qu'en avril et en mai, Nicolas Sarkozy briguant un deuxième mandat présidentiel fera tout pour convaincre ses compatriotes, de plus en plus eurosceptiques, qu'il défend corps et âme les intérêts français dans l'UE.

A quoi faut-il encore s'attendre ?

Probablement à beaucoup d'événements impossibles à prévoir aujourd'hui, tout comme à la fin de l'année 2010 nous ne pouvions envisager, même en rêve, qu'en août 2011 des hordes de Britanniques allaient, pendant plusieurs jours, piller les magasins à Londres.

C'est justement la tension sociale croissante et la frustration de la jeune génération qui menacent le plus la stabilité interne de l'Europe. Si on y ajoute une vague croissante de populisme politique en France, en passant par les Pays-Bas, la Finlande et la Hongrie, nous avons un mélange explosif de frustration sociale et de cynisme politique, tout aussi nourris par la faiblesse de l'Europe.

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