Le très probable futur Premier ministre de Slovaquie, Robert Fico (Smer-SD).

Un nouvel homme fort en Europe centrale ?

Pour la première fois depuis 1989, la Slovaquie sera gouvernée par un seul parti. Mais son futur Premier ministre, le social-démocrate Robert Fico, serait bien inspiré de ne pas prendre exemple sur son homologue hongrois Viktor Orbán, estime un éditorialiste de Pravda.

Publié le 13 mars 2012 à 16:36
Le très probable futur Premier ministre de Slovaquie, Robert Fico (Smer-SD).

Pour le Smer-SD, le succès électoral de ce week-end, constitue une opportunité unique de mener une politique gouvernementale conforme à ses idées, mais il signifie également qu’il sera tenu pour seul responsable des résultats qu’il obtiendra. Si Robert Fico, son président, maîtrise très bien l’art du combat politique, il doit aujourd’hui relever le défi de l’opinion publique.

Quand bien même son parti parviendra à engager des mesures de fond permettant de renforcer la cohésion sociale, comme l’introduction d’un système d’imposition progressif ou le renforcement du contrôle étatique des systèmes de retraites et de santé, il devra seul faire face à l’insatisfaction de l’opinion publique, qui ne manquera pas de s’exprimer après les coupes impopulaires programmées dans les dépenses publiques.

Il semble que Robert Fico ait pleinement pris conscience du fait que l’évolution de l’Europe à court terme exige un plus large consensus au sein de la société. C’est la raison pour laquelle, outre ses efforts visant à dissiper les peurs d’une répétition du scénario budapestois, il invite les partis politiques perdants à rejoindre la table des négociations. Toutefois, compte tenu des résultats du 10 mars, il ne peut compter sur un partage des responsabilités.

Le nouveau défi : l'emploi des jeunes

Mais la majorité absolue suscite sur la scène politique slovaque un réflexe quasi-atavique de coloniser toutes les structures étatiques, à commencer par l’administration publique et les forces armées et de sécurité, jusqu’aux entreprises publiques, aux appels d’offres et aux médias appartenant à l’Etat. Smer serait toutefois bien inspiré de considérer, à titre d’exemple dissuasifs, le discrédit dont est l’objet le régime d’Orbán sur la scène internationale ainsi que l’affaire "Gorila".

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Si la corruption et l’arrogance du pouvoir dépassent les limites de l’acceptable, la légitimité des élites politiques est susceptible, même en Slovaquie, d’être totalement remise en question, et ce pratiquement du jour au lendemain. Du reste, c’est la tempête qui a suivi la publication du dossier Gorila qui a contribué indirectement à la victoire sans précédent de Smer. Smer doit garder bien à l’esprit que l’élimination du danger des pratiques de corruption, qui finalement lèsent les classes sociales les plus défavorisées, fait partie intégrante du programme d’un Etat Providence.

Les défaites respectives du SNS [Parti national slovaque] et du SMK [Parti de la coalition hongroise] ont montré que les priorités de la société slovaque n’allaient pas aux tensions nationalistes. Le défi actuel réside dans l’offre de perspectives d’emploi et de carrière à la jeunesse hongroise de Slovaquie.

Les élections ont confirmé l’échec de la politique fondée sur l’exclusion et le creusement des antagonismes sur une base sociale et ethnique. La droite doit prendre conscience que les partis politiques de son camp qui ont insisté sur la nécessité d’introduire une dimension plus sociale dans la politique actuelle sont ceux qui ont remporté les plus grands succès.

Après le consensus néolibéral, que même la gauche postcommuniste d’Europe centrale a accepté et auquel elle a participé au cours des deux dernières décennies, un nouveau consensus semble émerger, qui se traduira par une plus grande responsabilité des classes élevées de la société et des grandes entreprises dans la cohésion sociale.

Vu d'Autriche

De populiste à consensuel ?

En Autriche, Der Standard note que c'est bien le scandale de corruption "Gorila" qui a décidé du résultat des élections. Le quotidien viennois observe tout de même que malgré la défiance générale des Slovaques envers leurs politiciens,

Robert Fico est resté l'homme politique le plus populaire. Comme, contrairement à son premier mandat, il a défendu une ligne pro-européenne et a obtenu avant même les élections l'approbation politique de la part de Hannes Swoboda, le chef du groupe des sociaux-démocrates autrichiens au Parlement européen, il ne devrait guère s'avérer être un 'Orbán de gauche', en dépit de sa majorité absolue.

La principale "pierre de touche" qui témoignera de la métamorphose de Fico d'un populiste en un homme politique de consensus sera cependant sa politique envers la minorité hongroise (9,7% de la population), affirme Der Standard :

Après son triomphe, Fico pourrait prendre le chemin de la tolérance, en souffrance depuis longtemps et attendu par l'UE, envers la minorité hongroise de moins en moins nombreuse, et ainsi isoler les extrémistes de tous bords.

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