"Atypique. Travaux à prévoir".

A vendre : pays en crise

Durement touchée par la crise, soumise à la rigueur et confrontée à des grèves, la Roumanie serait quasiment en faillite. Ni ses dirigeants ni les investisseurs européens ne semblent cependant prêts à réagir. Et ce sont la Russie et la Chine qui pourraient en profiter, craint România liberă.

Publié le 1 juin 2010 à 10:24
"Atypique. Travaux à prévoir".

Tandis que le président roumain reconnaît que son pays est en faillite, le gouverneur de la Banque nationale de Roumanie, Mugur Isarescu, a à son tour soudainement remarqué que son pays se retrouvait dans le même pétrin qu'il y a dix ans. A les entendre, tous les maux de la Roumanie se seraient abattus récemment sur le pays.

Acteurs et victimes de leurs propres machinations, les élites politiques de Roumanie ont pourtant toujours placé leurs propres intérêts au-dessus des intérêts nationaux, même lorsqu'ils savaient que leurs actions pouvaient conduire au désastre.

Le président Traian Basescu parle aujourd'hui du danger de "grécisation" du pays. Mais l'an dernier, le gouvernement d'Emil Boc (Parti démocrate libéral) a préféré dépenser sans compter sans que le président ne lui tape sur les doigts. La fausse philanthropie de l'exécutif était aussi rentable pour le président, car son enjeu n'a pas été d'extirper la Roumanie de la crise mais de remporter la course à la présidence. Sinon, Traian Basescu aurait obligé Emil Boc & Co. à procéder à des licenciements, baisser les salaires et cesser les acquisitions clientélistes.

Le président parle aujourd'hui de danger de "grécisation" de la Roumanie sans tenir compte de l'histoire et du potentiel différents des deux pays. Il a raison de s'alarmer pour la dette croissante du pays [supérieur à 78 milliards d'euros fin 2009], mais ses lamentations auraient pu commencer tout de suite après la campagne électorale et, éventuellement, en nommant un Premier ministre technocrate au lieu du politicien Emil Boc, qui non seulement aurait compris les mécanismes économiques, mais qui aurait également disposer d'une vision sur la manière d'éviter la catastrophe.

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Le président parle aujourd'hui de danger de "grécisation" sans réfléchir probablement au fait que les investisseurs occidentaux seront plutôt intéressés de "sauver" la Grèce que la Roumanie. Si les deux pays doivent mettre sur l'étal ce qu'elles ont encore à vendre, les acheteurs seront totalement différents. En Grèce, où les infrastructures de transport sont bien au point, le tourisme plus développé, et l'agriculture a su bénéficier des fonds européens, les Occidentaux s'empresseront de prendre des concessions ou d'acheter à prix réduits. En Roumanie, où les routes sont toujours en réparations, les usines ont été démantelées depuis longtemps, et l'agriculture est restée négligée et arriérée, viendront investir les Orientaux : les Chinois, au mieux, ou les Russes. Pour eux comptera autant le prix bradé que la (re)conquête d'une zone d'influence sous couvert économique.

Les Allemands préfèreront mettre la main sur les possessions grecques des rivages méditerranéens, de ce pays où l'on compte le plus de germanophones non-allemands en Europe, car la Roumanie est trop lointaine, trop à la traîne et un tantinet plus corrompue. Les deux pays proches de la faillite ont des perspectives totalement différentes, car le premier a toujours été convoité par l'Occident et l'autre - toujours guetté par les dangers venant de l'Orient.

Grève

Solidaires, mais attentifs à leur portefeuille

Seuls 10% des 700 000 fonctionnaires ont répondu à l’appel des syndicats à la grève , le 31 mai. "Beaucoup de fonctionnaires ont renoncé à protester parce qu’ils ne voulaient pas perdre davantage de leurs salaires en réduisant leurs temps de travail", noteRomânia libera. Le mécontentement contre les mesures annoncées par le gouvernement n’a pas diminué, mais la résignation remplace progressivement les premiers élans de protestation, conformément à une longue tradition de soumission de l’opinion collective en Roumanie, explique le quotidien dans son éditorial."L’enthousiasme des gens a brusquement baissé quand ils ont appris que les syndicats n’ont pas les moyens de compenser leurs salaires pour les jours de grève, et que c’est à eux d’assumer la perte de salaire", remarque un responsable syndical de Bucarest. A l’approche des vacances, avec un budget déjà restreint, ils se déclarent tous solidaires par principe, mais en réalité c’est chacun pour sa bourse.

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