L’Union monétaire avance. Péniblement.

Avec l’entrée en vigueur du Mécanisme de stabilité et la ratification du pacte budgétaire, le consensus sur l’union bancaire au sein de la zone euro pallie enfin les “défauts de naissance” de la monnaie unique. Fût-ce au prix d’un fossé grandissant avec les autres pays membres.

Publié le 11 octobre 2012 à 15:22

Le spectacle est rarement séduisant. Et seuls les initiés peuvent le suivre tant l'Europe se construit, ces temps-ci, dans la peine et la complexité. Mais ce qui se passe, encore une fois dans la douleur et sous l'effet de la crise, c'est la lente transformation de la zone euro en véritable union monétaire. Evolution nécessaire et positive.

Les 17 pays membres ayant la monnaie unique sont sur la voie d'une harmonisation budgétaire, sans laquelle une union monétaire ne saurait fonctionner. A Paris, l'Assemblée nationale a ratifié, mardi 9 octobre, le traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance - il n'y a que l'Europe pour raffoler d'appellations aussi poétiques. Mercredi, les députés ont adopté le projet de loi organique mettant en oeuvre la "règle d'or".

Traduit en langage courant, c'est un pacte budgétaire qui impose à ses signataires d'avoir des finances publiques allant vers l'équilibre. Sous une autre appellation barbare, celle de déficit structurel, le pacte introduit de la souplesse dans la poursuite de cet objectif.

Au début de la semaine, la zone euro a vu l'entrée en vigueur du Mécanisme européen de stabilité. Pouvant mobiliser jusqu'à 700 milliards d'euros, le MES est une sorte de Fonds monétaire européen. Il vient à l'aide des pays qui ont du mal à financer leur dette sur les marchés ou qui doivent recapitaliser leur secteur bancaire. Enfin, les Européens prennent le chemin d'une supervision commune de leurs banques.

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Des fondations bâclées

Harmonisation budgétaire, solidarité financière et union bancaire : tout cela se fait laborieusement. Le coût social est lourd, à court terme au moins, comme Angela Merkel a pu le percevoir lors de sa visite, mardi, à Athènes. Les Espagnols, fierté mal placée, hésitent à solliciter le MES. Les Allemands n'ont aucune envie que l'Europe "supervise" leurs banques. Les Français sont génétiquement réticents à l'idée même d'équilibre budgétaire, etc.

Mais il n'était que temps. Si l'on veut garder l'euro, alors il fallait corriger ce que ses pères fondateurs avaient bâclé : un mode de fonctionnement bancal qui a explosé au premier choc asymétrique. Il n'y a pas d'union monétaire sans union budgétaire, bancaire et sans solidarité financière. Il faudra vite y ajouter l'indispensable complément démocratique : d'une manière ou d'une autre, la gestion de ce triptyque doit se faire sous le contrôle des élus des 17.

Il est parfaitement respectable de refuser ce saut en avant dans l'harmonisation économique. Mais, alors, il faut dire non à l'euro. Le premier ministre britannique parle vrai quand il relèvait, dimanche à la BBC, que l'Europe ne peut plus marcher avec un seul budget. Il y en aura un pour la zone euro, avec des mécanismes de transfert avancés. Et un autre, plus limité, pour l'ensemble de l'Union. David Cameron veut en profiter pour renégocier, de façon beaucoup plus lâche, l'appartenance de son pays à l'Union.

Sans doute était-ce inévitable : à mesure que se fait l'union monétaire, une autre Europe se défait. Il y aura un cercle resserré, la zone euro, et un autre, plus large mais beaucoup moins étroit. On n'a pas fini de se coucher tard à Bruxelles.

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