Actualité Industrie automobile et changement climatique

L’UE n’atteindra pas ses objectifs sans règles plus strictes

L’Union n’atteindra pas les objectifs qu’elle s’est fixés d’ici 2025 en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre si elle ne s’attaque pas sérieusement à la pollution d’origine automobile. Certains pays font pression pour placer la barre très haut, mais d’autres, Allemagne en tête, freinent.

Publié le 20 juillet 2015 à 10:46

Quatre pays membres estiment que l’Union européenne devrait fixer de nouveaux objectifs ambitieux en matière d’efficacité énergétique pour les ouvelles voitures d’ici 2025 afin de réduire les coûts de transport pour les consommateurs et combattre le changement climatique.

Les ministres de l’Environnement et des Transports des Pays-Bas, de l’Irlande, de la Suède et de la Finlande ont écrit à la Commission européenne pour dire que ce nouvel objectif devrait être fixé l’année prochaine pour 2025. Il s’ajouterait à l’objectif actual, qui fixe à 95g de CO2 par km en moyenne par constructeur d’ici 2021. La moyenne en 2014 était de 123,4g de CO2/km.

De nouveaux et ambitieux objectifs pour 2025, accompagnés par un paquet de mesures sur l’infrastructure pour l’approvisionnement et d’autres questions, encourageront la transition vers une motorisation à émissions zéro pour les véhicules particuliers”, précise la lettre, que le Guardian a pu consulter. “Ces objectifs sont essentiels afin de stimuler de nouvelles innovations pour développer et améliorer les véhicules électriques, à hydrogène et hybrides rechargeables”.

Un groupe mixte de 11 eurodéputés a également écrit au commissaire européen pour le Climat et l’énergie Miguel Arias Cañete, en lui demandant de confirmer qu’il annoncera dès l’année prochaine les nouveaux objectifs en matière d’efficacité énergétique pour les années 2020.

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Le patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn a affirmé au Guardian début juillet qu’il ne pourra prévoir des volumes de production pour les voitures électriques tant que l’UE, les Etats-Unis et la Chine n’auront pas abattu leurs cartes en matière de consommation de carburant et d’émissions pour 2030.

Ces interventions donnent le cadre de la nouvelle bataille sur la règlementation, dans laquelle l’Allemagne devrait s’opposer à des objectifs ambitieux dans l’intérêt de constructeurs comme BMW et Daimler.

Lors de la dernière négociation sur l’efficacité énergétique de l’industrie automobile, il y a deux ans, la chancelière Angela Merkel a joué dur, obtenant que la limite sur les émissions sur laquelle les autres pays étaient tombés d’accord soit d’abord gelée et ensuite assouplie.

Mais cette fois, plusieurs pays de l’Union semblent avoir pris conscience du fait que les modestes engagements de l’Europe en matière d’énergies renouvelables et d’amélioration de l’efficacité énergétique ne permettront pas d’atteindre les 40% de réduction des émissions de CO2 sur laquelle les dirigeants se sont engagés.

L’industrie automobile en est bien consciente elle aussi et elle s’est précautieusement consultée avec les défenseurs de l’environnement et des consommateurs, afin de mettre en place une opposition plus subtile aux obligations de réduction des émissions.

L’Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), qui représente les marques les plus importantes, affirme qu’elle tente de mettre sur pied une alliance aussi vaste qu’inédite sur des approches alternatives vers un objectif pour 2025.

Il y a une limite à ce que nous pouvons encore améliorer du point de vue technologique [pour réduire les émissions] dans l’industrie automobile, il est donc essnetiel d’impliquer toutes les parties prenantes en amont, afin de mettre au point un programme plus ambitieux sur le changement climatique”, a déclaré un porte-parole.

Un récent texte exprimant la position de l’ACEA proposait de réduire la pollution automobile à chaque renouveau de la flotte, une utilisation plus ample des agrocarburants, des systèmes de transport “intelligents” et des leçons d’éco-conduite obligatoires pour les conducteurs. Cela comporte d’apprendre aux conducteurs à modifier leur comportement en anticipant davantage la circulation, en utilisant l’accélérateur plus lentement et plus doucement, en levant le pied plus tôt et en n’accélérant jamais à l’approche d’un feu de signalisation.

Il est prouvé que l’éco-conduite est efficace, mais uniquement pour une courte période”, affirme Greg Archer, un porte-parole de l’ong environnementale Transport and Environment (T&E) : “Immédiatement après, les gens conduisent de manière plus économique, mais ils reviennent assez vite à leur style de conduite habituel”.

Une récente analyse de T&E a révélé que les objectifs en matière d’efficacité énergétique des automobiles pour 2025 et 2030 pourraient produire près de la moitié de l’entière contribution du secteur des transports aux seuils fixés pour 2030. Sans eux, de lourdes taxes sur le carburant, de nouveaux péages ou de profondes réformes de la planification seraient nécessaires.

De leur côté, les constructeurs automobiles affirment que les mesures les plus faciles à mettre en œuvre pour réduire les émissions ont déjà été prises – et à grands frais pour l’industrie – et que tout pas en avant supplémentaire reposerait sur le passage aux véhicules électriques.

Une source européenne, qui tient à garder l’anonymat, qualifie cet argument de “désinformation”, car les recherches indiquent que les propulsions diesel hybrides pourraient ramener les émissions de CO2 à 65g/km d’ici 2035.

C’est n’importe quoi”, ajoute le fonctionnaire européen : “Le potentiel technique pour améliorer encore beaucoup les moteurs à combustion interne existe”.

En 2013, la Commission s’était engagée à revoir les limites de 2025 (68-78g/km de CO2 pour les véhicules neufs) l’année suivante. Elle n’a pas encore terminé de le faire.

Cet article est publié dans le cadre du partenariat entre VoxEurop et l’initiative du Guardian Keep it in the ground en faveur de la décarbonisation.

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