A chaque attentat terroriste commis sur le sol européen, le scénario est le même et il est désespérant : alors que les terroristes mènent une attaque en grand contre l’Europe, l’Europe réagit modestement. Les revendications des attentats tout comme les déclarations et les parcours des djihadistes (surtout des djihadistes européens) montrent leur haine viscérale pour tout ce que l’Europe symbolise : un espace de liberté individuelle, des valeurs démocratiques et une tolérance religieuse unique.
Quiconque fait partie de cette communauté européenne, qui est autant une idée qu’un projet et un style de vie, est une cible potentielle, même s’il est musulman : ceci explique que les assaillants du Bataclan à Paris en novembre dernier n’aient pas séparé selon la religion ou la nationalité les 1 500 personnes qui s’y trouvaient pour les exécuter de manière sélective, estimant que tous ceux qui s’y trouvaient étaient des cibles légitimes.
En novembre, l’Europe a été attaquée, mais elle n’a pas réagi en tant que telle. Au lieu de solliciter l’activation de la clause de solidarité prévue par l’article 222 du Traité sur l’Union européenne, qui aurait impliqué une réponse collective et coordonnée de la part de l’Ue, le gouvernement français a préféré avoir recours à l’article 42 , qui situe la réponse sur le plan intergouvernemental et en dehors des institutions européennes.
Au-delà de l’aspect technique et juridique, le message est très clair : comme l’a démontré la décision de Hollande de bombarder immédiatement les bases du groupe Etat islamique en Syrie, le gouvernement français voulait se réserver la liberté complète d’agir sur tous les fronts de la lutte antiterroriste.
Comme pour la crise des réfugiés ou la politique en Syrie, les Etats membres préfèrent conserver la compétence exclusive sur les questions qui ont trait à des sujets sensibles tels que la sécurité. Et pourtant, la connexion belge des attentats de Paris a démontré que ce prisme axé sur la souveraineté nationale était une profonde erreur.
Pour nous le rappeler, les djihadistes ont à présent attaqué Bruxelles, la capitale de l’Union européenne. Mais nombreux sont ceux qui penseront qu’il s’est agi d’une attaque contre la Belgique. L’Europe est une entité abstraite pour laquelle personne n’est prêt à mourir. Mais le fait que nombreux sont ceux prêts à tuer des Européens devrait nous donner une idée de la force de notre identité et de notre projet.