Pierre Vimont : “Inventons notre propre intégration”

Publié le 30 janvier 2012 à 14:18

Le "smart power", la puissance intelligente, est-elle une voie pour l'Europe ? A l’occasion d’un colloque organisé par la Fondation Schuman et l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) posant cette question, le numéro 2 de la diplomatie européenne, Pierre Vimont, a rappelé que l'UE reste encore une puissance qui se cherche :

Si on prend l’Europe dans sa perspective historique, on a un problème de fond non résolu. L’UE était au départ un projet de paix. Mais après Maastricht, l’étape suivante, le passage de la puissance économique à une puissance politique ne s’est pas fait. Tout simplement parce qu’il n’y a pas d’accord entre les Etats membres. Et nos partenaires se demandent en conséquence si nous sommes sérieux dans la volonté de faire de cette UE une vraie puissance politique qui a sa place dans le monde. L’Europe se voit comme un soft power, la plus intelligente possible, mais elle n’a pas une véritable doctrine d’action par rapport à ce concept. Comme très souvent dans la construction européenne, nous sommes restés au milieu du gué.

Tout en notant que sans le réglement "de la crise financière, tout le reste n’a pas trop d’importance", le Secrétaire général exécutif du Service européen pour l'action extérieure (SEAE) plaide donc pour la définition d'une vision stratégique de l'UE.

Il faut définir un plan d’action et une idée commune à 27 sur la doctrine future de l’UE, pas à 30 ans, mais plus modestement, à 5-7 ans. Il nous faut définir des priorités, un but précis de ce qu’on doit faire avec les moyens que l’on a. En vérité, l’UE a absolument tous les moyens d’action, dans tous les domaines, militaire, économique, commercial, ou dans l'aide [au développement]. Une force extraordinaire, mais qui n’a de sens que si tout cela est regroupé. C’est une des tâches du SEAE. Il est évident que tout ceci n’est pas du tout vécu à Bruxelles de manière politique, mais administrative. Pour l’instant ,ce que je vois à Bruxelles, c’est que chacun essaie de tirer son épingle du jeu, dans des combats administratifs et politiques sans fin. Quotidiens. Il faudra bien qu’à un moment, les politiques, au sein des Etats membres et des institutions, aident à sortir un peu de cette ornière pour essayer de trouver la vision générale dont on a besoin. Il s’agit d’utiliser toute la boite à outils dont on dispose.

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Mais pour l'ancien ambassadeur de France à Washington, la constitution d'une Europe puissance ne suppose pas forcément celles des Etats-Unis d'Europe,

parce que nous sommes fondamentalement partis d’Etats nations puissants et avec leur propre culture. Mais cela fait notre force. Nous n’avons pas besoin de vouloir imiter à tout prix le fédéralisme américain. Inventons notre propre intégration.

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