Dacian Cioloş: “La réforme de la PAC, demandée bien avant moi”

Publié le 14 mai 2012 à 13:12

Le commissaire européen à l'Agriculture a reçu Presseurop dans son bureau du 8ème étage du Berlaymont, à Bruxelles. Dans cet entretien, il défend son projet deréforme de la Politique agricole commune (PAC).

Vous avez parcouru tous les Etats membres pour présenter le projet de reforme de la Politique agricole commune (PAC). A-t-il été bien reçu ?

J'ai visité certains Etats membres avant l'élaboration du projet, mais je les ai tous parcourus au moins une fois. Mes propositions législatives ne sont que le reflet des débats que j'ai eus dans des nombreuses capitales, avec des organisations d'agriculteurs, de consommateurs ou de protection de l'environnement: de ce point de vue, les points essentiels de la réforme de la PAC n'ont été contestés ni au Parlement, ni au Conseil Européen. Je n'ai entendu personne dire : "Nous sommes totalement contre le principe de lier une partie du soutien financier aux agriculteurs au choix d'une agriculture durable". Personne qui soit contre l'idée que nous devons avoir une définition de l'agriculteur actif...

Les pays de l'Est, surtout, se réjouissent à l'idée d'un équilibre entre petits et grands exploitants. D'une équité entre petits et grands pays agricoles. Mais un peu partout dans l'Union, les grands exploitants ont manifesté leur mécontentement. Comment allez-vous faire pour satisfaire tout le monde?

Le meilleur du journalisme européen dans votre boîte mail chaque jeudi

Vous faites certainement allusion aux contestations liés au plafonnement des subventions. Je pense que nous sommes en réalité devant une tactique de négociation. L'idée du plafonnement n'est pas nouvelle, ce n'est pas le commissaire Cioloş qui l'a inventée. Elle est demandée par le grand public depuis longtemps car si les agriculteurs sont bien les premiers bénéficiaires des instruments de la PAC, ce sont les contribuables européens qui alimentent son budget et qui attendent de voir ses objectifs atteints. Tant que nous utilisons de l'argent public, notre politique doit livrer des résultats à ceux qui la financent. C'est pourquoi je considère que le débat public a été important.

On affirme pourtant que beaucoup d'exploitations feront faillite si la réforme est adoptée...

Nous avons environ 10 millions de bénéficiaires directs et le plafonnement ne viserait quelques 4 000 exploitations. Je pense qu'il est inutile de renoncer à une réforme parce que 4 000 personnes sont affectées, et encore, de quelle façon : ils ne recevront plus les millions d'euros de subventions publiques ! Quand des Etats membres me disent que 4 000 agriculteurs vont faire faillite à cause de la Commission Européenne, je ne crois pas que ce soit un bon argument. Si ça leur arrive, c'est plutôt à cause de leur gestion. Parce que si une grande exploitation est rentable seulement grâce aux subventions européennes, il y a un problème de management.

De plus, l'argent qu'on ne leur verse pas reste dans leur pays. Par exemple : si le Ryaume-Uni compte des exploitations affectées par le plafonnement, les subventions ainsi économisées seront versées au programme de développement rural du pays, qui, à son tour, pourra les redistribuer. Même pour leur propre compte, si elles adoptent des mesures écologiques, d'innovation etc. Grâce à cette mesure, nous voulons juste une meilleure utilisation des fonds publics.

Les paiements directs ont comme objectif de soutenir les agriculteurs. A partir d'une certaine somme, je ne peux plus soutenir un agriculteur qui gagne 2 millions d'euros par an. Il ne s'agit plus alors de soutien mais de rémunération d'un capital.

S'agissant du plafonnement, il s'appliquera aux revenus de 70% de la surface cultivée. Quant au 30% restant, l'agriculteur se devra d'appliquer des bonnes pratiques agricoles, du bon management des ressources naturelles…Et si ces mesures s'appliquent sur toute la surface de l'exploitation, l'agriculteur recevra des subventions proportionnelles à cette surface.

Propos recueillis par Iulia Badea Guéritée

Tags
Cet article vous a intéressé ? Nous en sommes très heureux ! Il est en accès libre, car nous pensons qu’une information libre et indépendante est essentielle pour la démocratie. Mais ce droit n’est pas garanti pour toujours et l’indépendance a un coût. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à publier une information indépendante et multilingue à destination de tous les Européens. Découvrez nos offres d’abonnement et leurs avantages exclusifs, et devenez membre dès à présent de notre communauté !

Média, entreprise ou organisation: découvrez notre offre de services éditoriaux sur-mesure et de traduction multilingue.

Soutenez le journalisme européen indépendant

La démocratie européenne a besoin de médias indépendants. Rejoignez notre communauté !