Le crépuscule du “sarkoberlusconisme”

Publié le 9 juin 2011 à 22:17

Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi s'apprécient, et ne le cachent pas. En juin 2008, Nicolas Sarkozy est le premier dirigeant étranger à être reçu par Silvio Berlusconi, alors que celui-ci vient d'être réélu à la présidence du Conseil. A l'époque, Le Monde consacre un article aux deux hommes d'Etat, remarquant de nombreux points communs:

Tous deux de droite, grands séducteurs et habiles communicateurs, ils partagent de nombreuses valeurs, un style "bling- bling" et un talent pour la théâtralisation. (...) Economiquement, les deux dirigeants s'inspirent du modèle américain, vénèrent l'efficacité de l'entreprise, mais sans craindre d'avoir, à l'occasion, des comportements interventionnistes, voire protectionnistes.

La comparaison entre le président français et le chef du gouvernement italien n'est pas neuve, mais le politologue Pierre Musso est le premier à lui donner le nom de "sarkoberlusconisme". Ce néologisme apparaît pour la première fois dans son essai du même nom, paru en avril 2008 (éditions de l'Aube) ; il sera très vite repris dans les éditoriaux des deux côtés des Alpes. Aujourd'hui, Pierre Musso en publie une version approfondie et remaniée chez le même éditeur: Sarkoberlusconisme : la crise finale?

Obsession du mouvement, culture du résultat, théâtralisation de la vie politique: malgré leurs points communs, les différences entre les deux hommes subsistent. A commencer par leur parcours: l'un est issu du monde des affaires et a découvert la politique sur le tard, "un antipolitique qui découvre la politique en y entrant", l'autre est "un politique professionnel qui veut rompre avec une forme classique du politique."

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Deux parcours différents, et pourtant de nombreuses ressemblances dans leur façon de faire de la politique: autant de raisons qui justifient la comparaison de Pierre Musso :

Comparer les deux personnages et leurs démarches permet de les éclairer. En comprenant Berlusconi, on éclaire Sarkozy et réciproquement. Car l'ombre de l'un (l'antipolitique vue de l'entreprise) est la lumière de l'autre (la politique revue de l'entreprise). On retrouve dans le centaure sarkoberlusconien les deux figures du prince identifiées par Machiavel : le politique professionnel et l'homme venu du privé.

Si la démarche est toujours d'actualité, Pierre Musso remarque toutefois que le "sarkoberlusconisme" est en crise, fragilisé par la crise économico-sociale en France et par les affaires judiciaires et de mœurs du chef de l'Etat italien. Toutefois, son avenir ne dépend pas que des deux chefs d'Etat:

Si le crépuscule du "sarkoberlusconisme" semble arrivé, il n'a pas dit son dernier mot tant que les centres-gauches n'auront pas construit une alternative en France comme en Italie, en dehors des simplistes fronts 'anti-Sarkozy' ou 'anti-Berlusconi' qui ne feraient que le conforter.

L'avenir du "sarkoberlusconisme" dépend aussi de l'intelligence de ses adversaires.

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