Rompre le cercle

Publié le 11 novembre 2011 à 12:54

Exit Berlusconi. Le dernier des chefs de gouvernement des PIIGS, ce charmant acronyme inventé par les Anglo-saxons pour indiquer les pays européens économiquement les moins vertueux, aura fini lui aussi par succomber à la seule loi qu’il n’a pu plier à son bon vouloir : celle des marchés.

Cette même loi avait en effet déjà réclamé la tête de l’Irlandais Brian Cowen, du Portugais José Sócrates, du Grec Georges Papandréou et de l’Espagnol José Luis Zapatero. En poste jusqu’aux législatives anticipées du 20 novembre, ce dernier n’est pas candidat à sa succession et a annoncé, comme ses confrères, qu’il quitterait la politique après des élections que son Parti socialiste va probablement perdre.

Implacable telle la loi de la nature, celle de crise de la dette balaye des gouvernements trop faibles pour lui résister. Faibles, car laissés seuls face à elle : on a vu que la solidarité entre partenaires de la zone euro ne se déclenche que lorsque la survie même de la monnaie unique — donc leurs intérêts vitaux — est menacée.

Faibles, car contraints d’adopter des mesures d’ajustement quasiment non négociables dictées par les instances internationales (FMI et UE). Faibles encore, car privés du soutien d’une population qui ne les a pas élus pour qu’ils en remettent en cause ses acquis. Faibles enfin, car incapables de lui dire la vérité, c’est à dire que, face aux assauts des marchés, ils ne peuvent pas grand chose, si ce n’est tenter de limiter la casse.

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Résultat : les gouvernements voient leur marge de manoeuvre se rétrécir ; leur rôle, en temps de crise, se borne à appliquer des décisions prises ailleurs et à gérer le quotidien. Les différences et les clivages qui marquaient la politique "pré-crise" s’estompent et les politiques sembles incapables de proposer — voire d’imaginer — des solutions qui sortent de l’orthodoxie.

Désorientés, les citoyens deviennent sceptiques face à la capacité de la politique à répondre aux problèmes et celle-ci voit sa légitimité s’effriter encore un peu plus, au bénéfice de la technocratie.

Pourtant, ce sont encore les politiques qui sont titulaires de cette légitimité démocratique. Le problème, c’est que les questions auxquelles ils sont confrontés dépassent le cadre de la souveraineté nationale. Celle-ci est le fondement et la limite de leur action.

Quant aux organisations supra-nationales qui pourraient intervenir plus efficacement sur ces questions — comme l’UE —, elles manquent de légitimité démocratique aux yeux des citoyens. Mais les Etats sont, parfois à raison, réticents à leur céder de nouvelles prérogatives. Et il faut des crises comme celle que l’Europe traverse actuellement, avec tous ses corollaires, pour que l’on envisage de rompre ce cercle.

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