Expulsions des Roms

Roumains et Bulgares regrettent le deux poids, deux mesures

Publié le 6 septembre 2010 à 09:43

La politique d’expulsion des Roms appliquée par la France est diversement appréciée dans deux des pays les plus concernés, la Roumanie et la Bulgarie. A Bucarest, Adevărul remarque que "jusqu’il n’y a pas longtemps, les Occidentaux nous donnaient des leçons sur la façon dont nous devons nous comporter envers les tsiganes. Qu’il s’agisse du lexique (dire "rom" et non "tsigane"), ou de la législation". Mais après 2003, quand "ils ont été envahis à leur tour, le discours a changé comme dans un mélodrame de boulevard. Ils ont pris des mesures drastiques que Bucarest, Bratislava, Budapest, Sofia, Zagreb ou Belgrade n’auraient pas osé prendre. N’est-ce pas pure hypocrisie ? L’Ouest nous a donné là une bonne leçon !"

Evenimentul Zilei estime que "personne ne peut être expulsé au seul prétexte qu’il fait partie de la minorité rom", tandis qu’ Adevărul juge que "l’exemple de la France a amplifié les attitudes racistes en Europe". Le quotidien rappelle que "les communistes ont essayé de contrôler les Roms en leur construisant des habitations, dans lesquelles ils ont installé leurs chevaux, préférant dormir sous le ciel. Maintenant les Français veulent les renvoyer vers des maisons qu’ils n’ont pas, à cause de leur nomadisme. Et c’est là la grande provocation de la France et de l’Europe : changer la mentalité d’une ethnie qui vit dans un monde moderne selon des lois figées dans le passé. La France rationnelle peut trouver mieux."

En Bulgarie, les autorités bulgares tentent depuis fin juillet de "ramener cette affaire à sa juste proportion", voire, selon certains observateurs, de "minimiser" la portée de ces retours. Une position facilitée par la quasi-absence de réaction de la part des représentants officiels de la communauté rom du pays. Le Premier ministre Boïko Borissov, cité par le quotidien d’opposition Sega, a lui-même expliqué que "de toute façon, chacune de ces personnes porte une responsabilité individuelle de ce qui lui arrive, il n’y a pas d’expulsions massives". Et dans Dnevnik, le ministre des Affaires étrangères Nikolaï Mladenov, assure que la polémique est surtout "une affaire interne à la France".

La plupart des médias bulgares considèrent en revanche que l’affaire est commune à toute l’Europe mais dans laquelle les appréciations ne sont pas les mêmes selon si l'on se trouve à l’Ouest ou à l’Est du continent. Les quotidiens populaires, tels Trud et 24 Tchassa, se sont étonnés de la "compréhension" de la Commission européenne face aux actions de la France et se sont demandés si Bruxelles aurait été aussi clémente si c’était Sofia qui s’en prenait aux Roms. "Si l’Europe, c’est deux poids deux mesures, alors on en veut pas. Non merci la France", a lancé l'éditorialiste deTrud, alors que dans Sega le chroniqueur Svetoslav Terziev accusait la France "d’organiser la plus grande déportation officielle depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale". "Chère France", écrit de son côté l’éditorialiste de Sega Boïko Lambovski, "nous qui sommes en queue de l’UE attendions de toi, la locomotive de l’Europe et patrie des droits de l’homme, que tu sois notre exemple en matière d'humanisme et d’intégration. Mais aujourd’hui, c’est tout à fait autre chose que tu es en train de faire."

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