Hongrie

Pas de shopping le dimanche

Publié le 28 mars 2015 à 09:00

Alors qu’en France, il est question d’en élargir le champ, en Hongrie, une nouvelle loi limitant l’ouverture des magasins le dimanche est entrée en vigueur le 15 mars, raconte The Budapest Times. Votée à l'initiative du parti fondamentaliste chrétien KDNP, partenaire minoritaire de la coalition au pouvoir, la loi ne s’applique qu’aux commerces couvrant moins de 200 m2 et gérés de manière familiale.

Font exception les pharmacies, les bureaux de tabac, les marchés fermiers et les supérettes des bases militaires, ainsi que les magasins situés dans des gares et des aéroports et aux cinémas et aux restaurants. “Interdites également les livraisons le dimanche et l’ouverture des commerces en semaine entre 22h et 6h du matin”, ajoute le journal.

Enfin, “l’interdiction ne s’applique pas pendant les quatre dimanches qui précèdent Noël et les commerçants pourront ouvrir UN dimanche par an de leur choix”. Quant aux magasins situés dans les zones touristiques, il semble qu’ils pourront rester ouverts, mais le gouvernement n’exclut pas de changer d’avis sur le sujet.

Jusqu’à présent, le moyen qu’ont adopté les commerçants et les chaînes de super et hyper marchés pour compenser les pertes subies en raison de l’interdiction d’ouverture le dimanche, c’est de prolonger l’horaire d’ouverture les autres jours. Mais pour les magasins de bricolage et les centres commerciaux, qui réalisent leurs plus fort chiffre d’affaire de la semaine le dimanche, il s’agit d’une perte sèche.

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C ela n’est pas du goût de tout le monde, et de nombreux salariés des firmes suscitées doivent affronter des journées de travail de 12 heures plus les transports. L’une d’entre eux raconte par exemple qu’elle passe l’essentiel de son jour libre à faire le ménage et du coup, elle perçoit son dimanche comme le jour des corvées. D’autres salariés se plaignent du fait que l’interdiction de travail le dimanche va les priver de la possibilité de faire des heures supplémentaires, payées 50% de plus les dimanches.

Cette réforme va à contre-courant de la tendance en Europe, note The Budpest Times, qui est à la libéralisation du secteur de la vente au détail. Si la France en discute, le débat a lieu aussi en Allemagne, aux Pays-Bas, en Norvège et en Autriche, où la fermeture dominicale relève du dogme. En Allemagne et en Autriche toutefois, la législation est en train de s’assouplir graduellement et où les exceptions se multiplient.

En Croatie, une interdiction semblable à celle qu’étudie la Hongrie existait depuis 2009, mais elle était toute aussi confuse que la magyare et les ventes au détail avaient chuté de 15% un an après son introduction. Elle a été finalement abrogée par la Cour constitutionnelle croate, qui a estimé que la mesure n’était pas nécessaire dans un état démocratique, qu’elle n’atteignait pas le but de protéger les salariés et qu’elle limitait la concurrence.

Espérant obtenir le même résultat, les syndicats et les association patronales hongroises envisagent de soumettre la loi interdisant le travail le dimanche à un référedum abrogatif, forts d’un récent sondage indiquant que la mesure est contestée par 68% des Hongrois.

Reflétant l’opinion de la majorité de ses concitoyens, le quotidien Magyar Nemzet, pourtant assez proche du gouvernement Orbán, estime que la fermeture obligatoire des magasins le dimanche est tout simplement une “atteinte à la liberté” :

Les Hongrois n'aiment pas qu'on leur impose les choses. Peut-être parce que l'éventail des possibilités qui s'offrent à eux est déjà assez limité. Non seulement pour les pauvres, mais aussi pour la partie inférieure de la classe moyenne. Si nous sommes libres depuis la fin de l'ère communiste, notre vie se cantonne aux premières nécessités. Le retraité autrichien a l'embarras du choix entre la croisière en Méditerranée ou le voyage à Prague ; pour le retraité hongrois, en revanche, ce choix est plus limité : c'est jambon cru ou jambon cuit. Nos politiques doivent savoir que dans une société où la liberté de choix est restreinte, le seuil de tolérance est très bas.man

Sur la même longueur d’onde, le site conservateur Mandiner notait que

Dans les Etats que nous envions le plus, tels que l'Autriche, la Suisse, l'Allemagne, la Norvège et la Suède, le commerce dominical est soumis à de fortes restrictions. C'est une vieille tradition, et les gens s'y sont habitués. … De notre côté, nous avons d'autres traditions et d'autres habitudes. … L'ouverture des commerces le dimanche ne signifie aucune immixtion dans notre vie et contribue à libéraliser l'activité commerciale. L'interdire, en revanche, constitue une ingérence dans notre vie en plus de nuire aux affaires.

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