“La plus grande menace pour l’Europe, c’est son inertie”

Publié le 16 avril 2015 à 14:41

Dans une interview accordée au magazine allemand Der Spiegel, Slavoj Žižek affirme que la responsabilité de nombreux déboires de l’Europe incombe à l’inertie du continent.

Le philosophe et gauchiste slovène dit que cela relève d’un choix conscient : “Je suis communiste parce qu’il n’y a pas de meilleure alternative, la situation de l’Europe me désespère”, dit-il. Pour lui, la crise européenne ne fait pas que remettre en question le capitalisme, elle frappe la démocratie occidentale en son cœur. Toutefois, “un retour au communisme serait impossible»

Selon Žižek, les quatre grands défis du système capitaliste mondialisé sont : le réchauffement climatique ; les conséquences visibles de la recherche biogénétique ; le manque d’autorégulation des marchés financiers et le nombre croissant de laissés-pour-compte. Il estime que seule “une gauche rénovée peut sauver les valeurs centrales de la démocratie libérale. […] Si la gauche rate le coche, le danger d’un nouveau fascisme ou d’un nouvel autoritarisme va croissant.

La réponse au fondamentalisme religieux, au populisme de droite et au nationalisme n’est pas plus l’inclusion et la tolérance, estime-t-il, mais une culture dominante qui met également en place des limites. La culture européenne serait “guidée” par les valeurs universelles des Lumières. Il affirme qu’une fois qu’une ligne est franchie, la coexistence culturelle n’est plus possible.

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Ce qui menace le plus l’Europe, c’est son inertie, son retrait vers une culture caractérisée par l’apathie et un relativisme généralisé”, dit-il, en faisant allusion au sentiment de culpabilité de l’Europe qui engendre la tolérance multiculturelle. Il pense que “cela crée un problème explosif lorsque deux groupes ethniques et religieux vivent ensemble dans un espace restreint, alors qu’ils ont des modes de vie inconciliables et perçoivent la critique de leur religion ou de leur mode de vie comme une atteinte à leur identité.

Cependant Žižek défend l’Europe et se qualifie de “gauchiste eurocentrique” :

Je suis convaincu que nous avons besoin d’Europe plus que jamais. Imaginez un monde sans Europe : il resterait deux pôles. D’un côté, les États-Unis et leur néolibéralisme sauvage ; de l’autre côté, ce qu’on appelle le capitalisme asiatique et ses structures politiques autoritaires. Au milieu, il y a la Russie de Poutine qui veut bâtir un empire. Sans Europe, nous perdrions la partie la plus précieuse de notre patrimoine, dans le cadre duquel la démocratie compromet la liberté de l’action collective, sans quoi l’égalité et la justice ne seraient pas assurés.

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