Le grand bazar du budget de l’UE

Les dirigeants des Vingt-Sept se réunissent à Bruxelles pour un Conseil européen extraordinaire consacré au budget de l’UE et marqué par les menaces de vetos des uns et des autres. La presse européenne se penche sur les marchandages en cours et disserte sur les probables gagnants et perdants.

Publié le 22 novembre 2012 à 14:44

La négociation se base sur le projet proposé par le président du Conseil européen Herman Van Rompuy, qui prévoit une réduction de 75 milliards d’euros sur les 1 048 milliards prévus. Les “grands” pays contributeurs, à commencer par le Royaume-Uni, voudraient voir leur apport diminuer, alors que les “petits” craignent une réduction des précieux fonds de cohésion.

Selon l’éditorial du Daily Telegraph,

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M.Cameron (et, nous voulons le croire, les dirigeants des autres pays contributeurs dont les contribuables sont fatigués de la prodigalité éhontée des institutions) est prêt à affirmer sa position cette fois-ci. Depuis que l’UE négocie son budget pour les sept prochaines années, c’est l’occasion de freiner l’incontinence fiscale de la Commission, une ambition qui mériterait d’être partagée par ceux qui s’inquiètent de voir que la menace de veto brandie par le Royaume-Uni compromettrait sa place au sein de l’UE. Au contraire, le refus arrogant de Bruxelles de réduire sa bureaucratie boursouflée nourrit un véritable anti-européanisme que les euromaniaques sont si inquiets d’éviter.

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De son côté, le Portugal arrive à Bruxelles avec la crainte de voir ses fonds structurels et ses aides aux régions rurales amputés de quelque 5,25 milliards d’euros entre 2014 et 2020. A Lisbonne, Público s'inquiète :

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L’approbation des budgets s’est déjà révélée une tâche difficile, mais cette fois, les intérêts nationaux et les blessures ouverts par la crise de l’euro, sans parler des différences de perspectives sur l’avenir de l’UE, font d’un accord une mission presque impossible. Si la Commission européenne a la force politique dont elle a déjà fait preuve, peut-être que ce serait acceptable pour les pays membres d’augmenter le budget de 5%. [...] Mais, étant donné le rapport de forces actuel, la proposition [du président de la Commission européenne] Barroso va immédiatement être rabotée par le Président du Conseil européen Herman Van Rompuy et même contestée par de nombreux pays qui menaceront de leur veto [...] La cacophonie va enfler et l’Europe s’approcher encore plus du chaos intitutionnel.

El Paísfait part des mêmes inquiétudes côté espagnol, car les coupes arrivent au pire moment pour Madrid :

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En cas de succès de la proposition de [Van Rompuy], l'Espagne pourrait perdre 20 milliards d’euros au moment où elle s’enfonce dans la récession et alors qu’elle va devenir, pour la première fois depuis son adhésion à l'UE, un contribuable net aux fonds communautaires.

A Budapest, le conservateur Magyar Nemzet s’indigne :

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Que les coupes se fassent au détriment des pays pauvres et au profit des Etats riches est purement scandaleux et inacceptable ! C’est une gifle qui, sans surprise, attend donc le Premier ministre hongrois Viktor Orbán. Pour des raisons mystérieuses, la Hongrie est l'Etat membre à qui Bruxelles veut ôter le plus de fonds.

Ne te dégonfle pas, Europe”, titre Gazeta Wyborcza, selon laquelle la proposition de réduction du budget de l’UE est un bon deal pour la Pologne, soulignant que si les Vingt-sept parviennent à ne pas aller au-delà, cela pourra être considéré comme une victoire :

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L’offre de Van Rompuy est très “allemande”. Les experts de Berlin estiment que 2-3 milliards d’euros peuvent être ajoutés pour la France et 2-3 enlevés à la Pologne. Et l’affaire est close. […] Le problème, c’est que les calculs raisonnables sont éclipsés par le sentiment eurosceptique qui se renforce dans une Europe frappée par la crise.

Le Monde revient sur les intérêts nationaux brandis par les capitales européennes pour se défendre des différentes options budgétaires discutées à Bruxelles. Il s’agit là d’un “faux égoïsme des Européens”, écrit le quotidien parisien, car derrière les “Rendez-moi mon argent !” qui rappellent le Premier ministre britannique Margaret Thatcher, se cacherait une comédie bien huilée :

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Ce credo égoïste ne correspond pas à la réalité de l’euro [...] Les Européens ne veulent pas être solidaires, mais le sont de fait. Ils sont comme un vieux couple, interdit de divorce, contraint de partager la même maison, mais où chacun compte son argent de poche pour marquer sa défiance.

Sur la même longueur d’onde, la Frankfurter Allgemeine Zeitung estime que la situation est loin d’être dramatique : “Le budget de l’UE est dans sa dernière ligne droite”, écrit-elle, même s’ils restent des divergences :

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Il y a des signaux positifs venant de toutes part. Même les Britanniques qui avaient menacé d’utiliser leur veto, saluent tout d’un coup le compromis, présenté récemment par Herman Van Rompuy. […] La crainte qu’un échec, au vu de la crise de l’euro, puisse gravement nuire l’UE, est visiblement trop grande. […] La stratégie de la Commission était claire : elle ne voulait pas heurter les grands contribuables comme l’Allemagne avec des exigences trop importantes. […] Ainsi Van Rompuy prévoit des engagements de 973 milliards d‘euros, une solution proche des 960 milliards défendus par l’Allemagne.

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