Partenariat oriental
Devant l'hôtel de ville de Lvov, à l'Ouest de l'Ukraine, le 20 novembre.

“L’Europe perd la bataille pour l’Ukraine”

En renonçant le 21 novembre à signer l’accord d’association proposé par l’UE, la semaine prochaine lors du sommet du Partenariat oriental, à Vilnius, Kiev tourne le dos à l’Europe et cède aux pressions politiques et économiques de la Russie, estime la presse européenne.

Publié le 22 novembre 2013 à 13:00
Devant l'hôtel de ville de Lvov, à l'Ouest de l'Ukraine, le 20 novembre.

Par son rejet le même jour de tous les projets de loi permettant le transfert à l'étranger pour raisons médicales de l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko, le Parlement ukrainien a par ailleurs rejeté la principale condition posée par l’Union pour la signature de l’accord.

“Viktor Ianoukovitch ou la fin d’un rêve”, titre le site d’information Oukraïnska pravda, au lendemain de la décision du gouvernement ukrainien de ne pas signer l’accord d’association avec l’Union européenne, à une semaine du sommet de Vilnius (28-29 novembre) consacré au Partenariat oriental de l’Union européenne. Pour ce journal d’opposition, c’est “pour avoir trop marchandé et trop bluffé” que le président ukrainien Viktor Ianoukovitch a mis fin au “rêve” de tout un pays :

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Cet accord d’association ne passionnait pas uniquement les médias étrangers, mais les Ukrainiens eux-mêmes. Nous en parlions partout : sur le marchés, dans les transports en publics et jusque dans les clubs de nuit

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A Varsovie, l’éditorialiste de Gazeta Wyborcza Mirosław Czech note que

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En renversant la table sur laquelle devait être signé l’accord d’association, le gouvernement ukrainien a confirmé l’opinion de ces politiques européens qui affirmaient que Ianoukovitch mène l’Europe en bateau, et tente de tirer le meilleur parti de la Russie. Et personne de sérieux ne voudra parler coopération avec un tel responsable. Le président ukrainien s’est dangereusement rapproché de politiques tels que [le président biélorusse Alexandre] Loukachenko, et l’Ukraine à des pays dirigés à la mode biélorusse. Mais l’espoir est le dernier à mourir. Pendant sa récente visite en Autriche, Ianoukovitch a déclaré que l’Ukraine ne dévierait pas du chemin vers l’UE. […] Alors tout n’est pas perdu ? Et verrons-nous aujourd’hui un nouveau revirement ? Qui peut le dire : les développements de ces vingt dernières années en Ukraine ont réservé des suprises encore plus grandes.

“Kiev se retire de l’Union”, titre pour sa part SME. Le quotidien de Bratislava écrit SME que le demi-tour dans les relations entre l’Union et l’Ukraine est une grande leçon pour les diplomates européens, qui se caractérisent souvent par leur “optimisme infondé”, sans se rendre compte avec qui ils négocient. Si la décision de Kiev représente un grand problème pour l’Europe, elle aura des conséquences encore plus néfaste pour les Ukrainiens, estime SME, car

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Le choix entre Bruxelles et Moscou n’est pas seulement une question des avantages économique à court terme […] mais aussi celle entre un Etat plus démocratique, un système légal fonctionnant mieux d’un côté et un Etat gangster et la misère de plus en plus profonde de l’autre. Ianoukovitch a choisi la deuxième option. Si lui et ses proches en tireront des bénéfices, la plupart des Ukrainiens en payera cher.

“Après avoir lamentablement perdu son match contre la France, l’Ukraine a-t-elle perdu l’Europe ? Cela y ressemble furieusement”, écrit Le Soir de Bruxelles, qui évoque l’élimination de l’Ukraine des qualifications pour le mondial de foot 2014. Pour le quotidien belge, le Partenariat oriental, censé rapprocher l’UE des ex-républiques soviétiques, est “en état de mort clinique”, et les pressions russes n’y sont pas pour rien :

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Les Lituaniens, qui assurent jusqu’à la fin de l’année la présidence tournante des travaux de l’UE, voient ainsi s’effondrer leur rêve de couronner leur semestre par un succès à Vilnius. […] Les puissants arguments sonnants et trébuchants de Moscou l’ont donc emporté.

Sur la même longueur d’onde, la Frankfurter Allgemeine Zeitung évoque un véritable “bras de fer” entre l’UE et la Russie. Selon le journal, cette décision, un an après le début des négociations sur l’accord d’association, arrive “beaucoup trop tard” :

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A force de menaces, de blocus commerciaux et de contrôles douaniers démesurés, le gouvernement à Kiev a bien reçu le message que la Russie a les moyens de pousser le pays, sur lequel pèsent déjà de nombreux problèmes, jusqu'à la faillite si l'Ukraine devait signer l'accord avec l'Union européenne.

“L’Europe perd la bataille pour l’Ukraine” résume à la Une le quotidien autrichien Die Presse, qui fait part de la stupéfaction totale à Bruxelles où l’on parlait encore d’une “situation dynamique” le 21 novembre à midi, avant de s’abstenir de tout commentaire dans l’après-midi. Mais c’est surtout la volte-face qui étonne Die Presse:

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A présent, la priorité sera donnée à la participation au projet concurrent, une union douanière instiguée par Moscou, dont [le président Viktor] Ianoukovitch avait pris les distances à l'origine.

A Tallinn enfin, Eesti Päevaleht s’inquiète de ce que l’UE puisse ne plus apporter son aide à l’Ukraine, à présent que Kiev a fait le choix du camp russe :

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Les évènements d’hier ont montré que le président Viktor Ianoukovitch n’a pas eu la force suffisante pour faire un pas décisif. La pression russe d’une part et les conditions imposées par l’UE d’autre part, s’avéraient être une tâche compliquée. […] Ce revirement où Kiev a interrompu ses relations d’amitié avec l’Europe, semble conduire à une situation où l’Ukraine n’a plus aucune aide à espérer de l’Ouest en cas d’une éventuelle pression de Moscou.

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