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La désinformation russe, nébuleuse à l’assaut de la démocratie slovaque

À l'approche des élections européennes, la menace d'ingérence du Kremlin dans les campagnes électorales devient de plus en plus réelle. La Slovaquie en a déjà fait l'expérience par le passé. Quelles leçons les autres Etats membres peuvent-ils tirer de cette expérience ?

Publié le 15 mai 2024 à 15:30
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En février 2024, les ministres des Affaires étrangères du Triangle de Weimar se sont réunis à Paris pour tenter d’insuffler un nouvel élan à leur coopération trilatérale. Composé de la France, de l'Allemagne et de la Pologne, le forum de coopération s'est réuni juste avant le deuxième anniversaire de l'invasion de l'Ukraine, pour discuter, entre autres, des défis posés par l’intensification des assauts russes.

"La Russie nous prend pour cible avec des actions hybrides, par le biais de la désinformation, des cyberattaques et de l'ingérence politique, dans le but de semer la division dans nos sociétés démocratiques”, affirme le ministère fédéral allemand des Affaires étrangères dans une déclaration officielle publiée à la suite de la réunion. “Cela reste la menace la plus importante et la plus directe pour notre sécurité, notre paix et notre stabilité dans la région euro-atlantique."

Pour plusieurs pays de l'UE, cette déclaration n'a guère été une surprise : la menace directe que représente la Russie est une réalité palpable depuis des décennies. En Slovaquie, l'influence malveillante de la Russie a sans doute déjà laissé des traces significatives sur la démocratie du pays. Beaucoup attribuent le soutien de sources de désinformation à la résurgence de l'ancien Premier ministre Robert Fico, un populiste pro-Poutine revenu au pouvoir en 2023. En Slovaquie, des experts examinent les campagnes numériques de la Russie depuis des années, ce qui leur a permis d'acquérir une connaissance approfondie de leur fonctionnement. À l'approche des élections européennes, il est essentiel que les Etats membres tirent des leçons de leurs expériences respectives afin de préserver leur intégrité démocratique.

Pour bien comprendre la scène de la désinformation en Slovaquie et sa trajectoire d'évolution, nous devons d'abord nous pencher sur les tendances conspirationnistes de la population slovaque. Des recherches menées par le groupe de réflexion GLOBSEC, basé à Bratislava, révèlent que plus de 50 % des personnes interrogées dans le cadre d'une étude nationale croyaient aux récits conspirationnistes, ce qui fait de la Slovaquie le pays le plus enclin aux théories du complot dans la région d'Europe centrale.

Dominika Hajdu, directrice politique du Centre pour la démocratie et la résilience de GLOBSEC, décrit certains des récits conspirationnistes les plus répandus et les plus influents en Slovaquie. “Les théories du complot qui ont toujours dominé sont celles qui prétendent que les démocraties n'existent pas vraiment parce qu'il y a d'autres ‘élites secrètes’", résume-t-elle.

"En général, il y a un personnage ou une entité, comme Bill Gates, George Soros, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou le Forum économique mondial (WEF), qui tirerait les ficelles et déciderait de ce qui est important en Slovaquie. L'élite secrète est toujours là, quelque part". Cette croyance qu'un groupe sans visage est en fait en charge de la Slovaquie brise la confiance dans les institutions démocratiques, incitant à "tout remettre en question" lorsqu'il s'agit de la politique et de la société.

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