
Economiste, enseignant à Science Po, à Ponts Paris Tech et à l’université de Stanford, Eloi Laurent est auteur de nombreux ouvrages, dont Sortir de la croissance (éd. LLL, 2019) et Nos mythologies économiques, (éd. LLL, 2016). Il vient de publier Et si la santé guidait le monde ? (éd. LLL, 2020). La pandémie de Covid-19 qui sévit dans le monde nous le rappelle cruellement : la vitalité des écosystèmes et la santé humaine sont étroitement liées.
Catherine André : Qu’est-ce qui est à l’origine de votre dernier livre Et si la santé guidait le monde ?
Eloi Laurent : Dans ce livre, j’ai voulu proposer un nouvel horizon, un nouveau récit dans lequel inscrire le sujet un peu aride du dépassement de la croissance et du PIB et des “indicateurs” de bien-être : la “pleine santé” comme boussole et bouclier des sociétés humaines dans notre siècle de l’environnement, un siècle qui a pour moi commencé le 7 avril 2020, quand 4 milliards d’humains ont dû sacrifier le cœur de leur humanité (leurs relations sociales) faute d’avoir pris soin de leur environnement.
La “pleine santé”, c’est une santé autant sociale qu’écologique, qui peut à mes yeux nous sortir de la crise en Europe, à double titre : la crise immédiate, qui est la crise de la coopération sociale, la désocialisation dont les ravages sur la santé mentale sont maintenant bien visibles qui appelle une stratégie de “revitalisation sociale”. Mais aussi la crise profonde d’insoutenabilité écologique du système économique, qui exige de prendre soin des écosystèmes pour notre propre bien.
Pourquoi les travaux sur le lien entre santé et environnement, qui existent pour certains depuis des décennies, ne sont-ils pas suffisamment pris en compte dans les politiques menées par les gouvernements ?
Les gouvernements sont aveuglés par le “progrès” à la mode du 20ème siècle, où croissance économique et progrès social sont allés (en partie) de pair, sans que la contrainte écologique ne paraisse forte ni même vraiment visible avant les mobilisations de masse des années 1960. Ce monde est derrière nous, nous avons irrémédiablement basculé dans un monde où une nouvelle alliance entre justice sociale et soutenabilité écologique doit prendre le relais. L’économie va être progressivement marginalisée comme mode d’organisation de la société et comme discours sur la société. Mais elle résiste.
Depuis les années 1980 et la financiarisation de l’économie, les acteurs de la finance nous ont appris que toute faille dans la loi cache une opportunité de gain à court terme. Les journalistes récompensés Stefano Valentino et Giorgio Michalopoulos décortiquent pour Voxeurop les dessous de la finance verte.
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