Revue de presse Lumière sur le Sud-Est

Dans les Balkans, les élections européennes ont entraîné des surprises et des glissements

Alors que les partis pro-européens du Sud-Est du continent gardent une distance plutôt confortable avec les extrémistes au terme de ces élections, on observe toutefois une montée des formations eurosceptiques dans la région. Plusieurs votants ont par ailleurs exprimé leur insatisfaction envers les leaders politiques actuels en se tournant vers des candidats indépendants au parcours parfois atypique.

Publié le 18 juin 2024 à 21:32

En Bulgarie, malgré une victoire de plus de 50 % des sièges du pays au Parlement européen par les formations pros européennes GERB-SDS (centre droit), Mouvement des droits et des libertés (DPS, centre) et Nous continuons le changement - Bulgarie démocratique (PP-DB, centre droit), les partis anti-européens ont remporté une part importante des voix le 9 juin, jour où ont eu lieu à la fois les élections européennes et les législatives anticipées. “Si nous additionnons les votes pour les partis pro-russes – Renaissance (extrême droite), le Parti socialiste bulgare (BSP, centre gauche) et Velichie (“Grandeur”, en bulgare), parti catapulté au Parlement –, ces trois formations gagnent de facto environ un tiers des voix ; c’est la surprise de ces élections”, explique la politologue Johanna Daimel au média allemand Deutsche Welle, citée dans le journal bulgare Capital.

Sur les douze eurodéputés croates, Stephen Bartulica Mouvement patriotique (extrême droite) a beau être le seul nationaliste à avoir été élu au Parlement européen, cela ne l’a pas empêché de se rendre, après sa victoire, au siège de son parti à bord d’une Ferrari conduite par un criminel inculpé pour tentative de meurtre. “Dans ce moment de célébration et d’euphorie, mon jugement n’a peut-être pas été le meilleur”, a-t-il ensuite déclaré au journal télévisé de la chaîne d’information croate Nova TV, comme le rapporte le quotidien Jutarnji List. L’Union démocratique Croate (centre droit) du Premier ministre Andrej Plenković a remporté la majorité des voix (34,60 %). Avec le Parti social-démocrate de Croatie (SDP, centre gauche), autre force pro-européenne, ils ont gagné la confiance de plus de 60 % de la Croatie.

L’une des plus grandes surprises de ces élections européennes vient peut-être de Chypre, où le youtubeur Fidias Panayiotou (indépendant) a remporté un siège au Parlement européen après avoir obtenu environ 20 % de voix, talonnant les deux partis en tête : le Rassemblement démocrate (DISY, centre droit ; 24,78 % des voix) et le Parti progressiste des travailleurs, gauche ; 21,49 % des voix). Dans un éditorial, le quotidien Cyprus Mail revient sur la façon dont “les faibles considérations pour les partis et le système politique” expliquant le succès de Fidias. 

À l’instar des Chypriotes, les Roumains ont aussi élu un eurodéputé indépendant : Nicu Ștefănuță (3,08 % des votes), le vice-président du Groupe des Verts au Parlement européen. Cependant, avec presque 50 % des voix, la force politique véritablement gagnante a été la coalition entre les sociaux-démocrates et les libéraux. Les partis d’extrême droite Alliance pour l’unité des Roumains (AUR) et S.O.S Roumanie ont obtenu environ 20 % des voix à eux deux. Comme l’explique Răzvan Filip de la plateforme d’information en ligne roumaine PressOne, l’AUR était déçue de ne pas arriver à un total de 25 % de voix.

En Grèce, le parti Nouvelle Démocratie (centre droit) a reçu la plupart des voix (28,31 %) et envoie sept eurodéputés sur les 21 du pays. On peut souligner “l’importante montée” du parti communiste de Grèce (KEE) dont le nombre de voix a presque doublé depuis les dernières élections européennes (passant de 5,35 % en 2019 à 9,25 % en 2024). Une “importante montée”, comme se félicite le secrétaire général du KEE, cité dans le quotidien grec Efimerida ton Syntakton.

Prévisions nuageuses pour les pays hors UE

C’est presque l’été en Europe, mais les prévisions pour les pays hors UE ne sont pas au beau fixe. La Russie a par exemple décidé récemment d'accroître son influence en Moldavie, quelques mois avant les élections présidentielles et le référendum sur l’adhésion à l’UE, tous deux prévus pour le 20 octobre. Victoria Borodin, de la plateforme d’investigation moldave Ziarul de Gardă, attire l’attention sur l’ancien président Igor Dodon, l’oligarque pro-russe condamné Ilan Șor, ainsi que sur d’autres personnalités publiques qui ambitionneraient de répandre de fausses informations sur les raisons du recensement ayant lieu du 8 avril au 7 juillet 2024.


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Certaines nouvelles sont encore plus mauvaises. Selon Măriuța Nistor du Ziarul de Gardă, Ilan Șor aurait rencontré des agents pro-russes à Moscou, dont Evghenia Guțul et Dmitri Constantinov, afin de créer un nouveau bloc politique de déstabilisation de la Moldavie nommé “Victoire”. “Ce qu’il s’est passé à Moscou est tout bonnement une action des services secrets et d’autres institutions spécialisées de la Fédération de Russie”, dénonce le politologue Anatol Țăranu, cite par Victoria Borodin pour le Ziarul de Gardă.

Erdoğan et son sultanat, une imitation de la Russie ?

Le régime de Recep Tayyip Erdoğan (AKP, islamo-conservateur) a encore une fois révélé ses défaillances autoritaires ces derniers mois, alors qu’a été formulée une demande d’emprisonnement à l’encontre de Kemal Kılıçdaroğlu, ancien leader du Parti républicain du peuple (CHP, centre gauche). En réaction à l’injonction, reçue pour avoir insulté le président turc, ce dernier a simplement répondu : “Tu ne seras pas un sultan”, comme le rapporte le quotidien turc Cumhuriyet.

En plus de l’emprisonnement d’un journaliste et de la tentative d’incarcération de son ancien rival, Erdoğan a récemment changé le système éducatif en y ajoutant un nouveau programme controversé. Toujours pour Cumhuriyet, Murat Agirel explique que l’on assiste aujourd’hui à “une intensification de la “religieuxisation” [du pays] et à l’éloignement des standards européens en matière d’enseignement secondaire”. De quoi rappeler une autre personne qui apprécie peu les standards européens.

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