Le rendez-vous du 6 mai

Publié le 16 avril 2012 à 07:23

Les Américains ont le super-tuesday, le jour où plusieurs Etats votent pour les élections primaires, marquant souvent un tournant décisif dans le processus de désignation des candidats à la présidentielle. En Europe, cette année, le 6 mai s’annonce comme un super-sunday. Ce jour-là se tiendront le second tour de l’élection présidentielle en France, des élections législatives et une présidentielle anticipée en Serbie, et des législatives anticipées en Grèce. Ces trois scrutins auront une influence sur la plupart des grandes questions de l’Union européenne : gouvernance politique et économique, libre circulation, élargissement, lien entre l’UE et les citoyens, et bien sûr crise de la zone euro.

Ainsi, la présidentielle française pourrait se solder par une dicussion sur une renégociation du pacte budgétaire - comme le promet le socialiste François Hollande - ou par une redéfinition des accords de Schengen - ce que réclame le président sortant, Nicolas Sarkozy, en menacant d’en faire sortir son pays. L’identité du vainqueur aura également des implications sur la relation franco-allemande, les liens entre droite et gauche européennes ou entre petits et grands pays.

En Serbie, le président Boris Tadić a profité des législatives pour remettre son mandat en jeu et obtenir un blanc-seing pour sa politique pro-européenne. S’il était réélu avec une majorité au Parlement, il bénéficierait de la marge nécessaire pour mener son pays sur les traces du voisin croate, vers une adhésion à l’UE porteuse de stabilité dans les Balkans occidentaux. Sa politique discrète d’abandon de la revendication sur le Kosovo, condition posée par l’Europe, serait alors peut-être irréversible même si elle n’est pas exempte de tensions dans l’ancienne province yougoslave.

Quant aux élections grecques, elles seront la première occasion pour le peuple hellène dese prononcer sur la politique de ses dirigeants depuis le déclenchement de la crise qui a failli emporter le pays. Certes, l’alternative - c’est-à-dire le choix acceptable pour les bailleurs de fonds et les marchés financiers - semble se limiter au Pasok (socialiste) et à Nouvelle Démocratie (droite). Mais pour ces deux partis, qui ont passé des mois à essayer de se neutraliser avant de gouverner ensemble sous la houlette de Lucas Papadémos, l’heure des comptes a sonné. Aucun des deux ne dépasse les 20% d’intentions de vote et tous deux se voit débordés par des partis dissidents ou extrêmistes opposés à la politique d’austérité et de remise en ordre de l’Etat imposée par l’UE et le FMI.

Le meilleur du journalisme européen dans votre boîte mail chaque jeudi

La contestation des politiques “mainstream” sera le point commun aux trois rendez-vous électoraux, et un baromètre pour l’ensemble de l’Europe, puisque l’échantillon sera assez représentatif : un pays fondateur de l’UE encore prospère, un pays de la “périphérie” en crise, un pays sur le chemin de l’adhésion.

En France, la compétition pour la troisième place derrière Hollande et Sarkozy (sur 10 candidats) se joue entre la représentante de l’extrême droite, Marine Le Pen, qui prône l’abandon de l’euro, et Jean-Luc Mélenchon, soutenu entre autres par le Parti communiste, qui veut “s’affranchir du traité de Lisbonne”. En Grèce, le parti Chrysi Avgi (Aube Dorée), quasiment néo-nazi, et le LAOS, la formation d’extrême-droite qui a participé un temps au gouvernement Papadémos, disputent le vote protestataire et anti-européen aux communistes du KKE, à la Syriza (Coalition de la gauche radicale) et à la gauche démocratique. En Serbie, enfin, les nationalistes restent une force influente sur laquelle s’appuie le Parti progressiste serbe de Tomislav Nikolić, en têtes des sondages pour les législatives.

Même s’il ne faut pas oublier que l’avenir de l’Europe se joue également sur les places boursières de Madrid, de Milan et d’ailleurs, la photographie électorale du dimanche 6 mai nous permettra peut-être d’apercevoir le visage de l’Europe des prochains mois.

Tags
Cet article vous a intéressé ? Nous en sommes très heureux ! Il est en accès libre, car nous pensons qu’une information libre et indépendante est essentielle pour la démocratie. Mais ce droit n’est pas garanti pour toujours et l’indépendance a un coût. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à publier une information indépendante et multilingue à destination de tous les Européens. Découvrez nos offres d’abonnement et leurs avantages exclusifs, et devenez membre dès à présent de notre communauté !

Média, entreprise ou organisation: découvrez notre offre de services éditoriaux sur-mesure et de traduction multilingue.

Soutenez le journalisme européen indépendant

La démocratie européenne a besoin de médias indépendants. Rejoignez notre communauté !