Alors que, le 28 septembre, nous célébrons la Journée internationale de l'accès universel à l'information, l'avenir reste trop sombre pour être envisagé pour trop de personnes. Nous vivons actuellement dans un état de flux perpétuel, d'incertitude générale et d'insécurité profonde et déstabilisante.
Notre monde repose de plus en plus sur l'information, parfois presque exclusivement, et les médias sont son infrastructure de base.
Comme pour l'eau et l'énergie, nous ne remarquons souvent son absence que lorsque la source se tarit. Il en va de même pour les informations fiables : ce n'est que lorsqu'elles disparaissent que nous réalisons à quel point notre vie quotidienne dépend de la fourniture régulière d'informations fiables.
L'intelligence artificielle est un élément important de notre avenir commun, mais elle ne sera pas la panacée pour tous les problèmes que nous rencontrons. Un algorithme ne peut toujours pas remplacer un reporter tenace ou une journaliste d'investigation chevronnée.
Ce sont les êtres humains qui font la différence, car seuls eux peuvent apporter empathie, discernement moral et persévérance dans la recherche de la vérité. Alors que les institutions traditionnelles s'effondrent et que beaucoup ont déjà disparu sans être remplacées, cette tâche devient chaque jour plus complexe.
En cette période troublée, le devoir des médias, leur travail quotidien, voire leur existence même, semblent plus importants et plus déterminants que jamais. Nous restons les messagers les plus importants de la vérité. Si nous voulons continuer à tenir la promesse de notre mission, nous, les médias, devons également réfléchir longuement et sérieusement à l'avenir.
Nous avons conscience qu'il est urgent de réaffirmer le pacte qui lie les médias aux communautés au service desquelles ils se trouvent, de renforcer notre engagement personnel envers chacun de nos lecteurs et lectrices, téléspectateurs et téléspectatrices, auditrices et auditeurs, et de rester fermement en place alors même que le sol se dérobe sous nos pieds.
Nous nous efforçons d'être les gardiens de la frontière qui sépare le présent d'un avenir dystopique bien trop réaliste.
Au moment où vous lisez ces lignes, le journalisme est suspendu en équilibre précaire entre l'ancien et le nouveau monde ; il fait partie intégrante de l'Histoire, mais aussi de la transformation qui est en train de bouleverser notre humanité ; il est une force de changement, mais risque lui-même de devenir une relique du passé.
Ce qui était autrefois une activité très rentable est aujourd'hui un secteur en difficulté, dont l'avenir est incertain. En cette période de changement, le modèle économique traditionnel des médias a rapidement vieilli, et une alternative n'est toujours pas en vue. Lorsque les salles de rédaction ferment, les sociétés perdent leurs gardiens, la corruption prospère dans l'ombre, la vérité a moins de défenseurs.
Les médias ne gagnent presque plus d'argent, le harcèlement est notre quotidien et notre viabilité à long terme est menacée. La précarité financière frappe à la porte de tous les médias, sauf à celle des plus solides.
Les autocrates, les “Big Tech”, les influenceurs et les industries de tous bords sont toujours de grands consommateurs de médias, même si un grand nombre d'entre eux affirment que ceux-ci n'ont plus aucune importance. Les lecteurs “ordinaires” ne le savent peut-être pas, mais dans chaque discussion, chaque débat, chaque prise de décision, les médias ont joué un rôle important, et souvent décisif.
Pendant des décennies, le journalisme a été le défenseur des valeurs démocratiques internationales et du système fondé sur des règles qui a défini notre civilisation et qui a sous-tendu une période de croissance et de prospérité planétaires sans précédent, bien que répartie de manière inégale. Nous avons été présents à chaque étape : pour dénoncer les violations des droits humains, l'horreur des conflits armés, l'injustice de la corruption, et bien d'autres choses encore.
Lorsque les salles de rédaction ferment, les sociétés perdent leurs gardiens, la corruption prospère dans l'ombre, la vérité a moins de défenseurs.
Il est toutefois très improbable que nous retournions un jour à cette “ancienne” époque : les progrès technologiques ouvrent la voie à une nouvelle ère qui bouleverse les fondements mêmes de notre vie commune. Et pourtant, quelle que soit la forme que prendra notre “nouvelle” civilisation, elle devra toujours reposer sur des informations fiables, car c'est la seule base solide sur laquelle on peut construire quelque chose de durable.
En tant qu'espèce humaine, nous avons évolué parce que nous avons été capables de transmettre des informations à la génération suivante. L'information est la meilleure et peut-être la plus puissante technologie que nous ayons jamais inventée.
Mais nous ne pouvons rien créer ni recréer en avançant à l'aveuglette ou en tâtonnant dans le noir.
Ce ne sont pas seulement les démocraties qui meurent dans l'obscurité, ce sont des civilisations entières qui périssent.
Le message que les médias veulent faire passer en cette Journée mondiale de l'information ne concerne pas la sauvegarde des emplois dans le secteur, mais la sauvegarde de ce que nous avons tous construit au fil des millénaires. Notre civilisation mérite que l'on se batte pour elle.
Une écrasante majorité de journalistes prêtent un serment tacite de se mettre au service de nos communautés en œuvrant pour la vérité. Il s'agit d'un devoir sacré qui donne un sens à notre vie et qui compense largement les difficultés financières et les privations.
La vérité et la confiance sont vraiment essentielles dans des moments comme ceux-ci.
Et la meilleure façon de vous respecter vous-même est de choisir avec soin vos sources et les personnes en qui vous avez confiance. Soutenez les médias qui vous soutiennent. Abonnez-vous, partagez, défendez la vérité. Choisissez un journalisme digne de confiance, car sans lui, la lumière s'éteindra pour nous toutes et tous.
Cette tribune a été commandée dans le cadre de la campagne World News Day, une initiative visant à montrer la valeur du journalisme.
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