Idées L’Europe et la crise des réfugiés
Des gilets de sauvetage abandonnés par des migrants sur une plage de l'île grecque de Lesbos, en octobre 2015.

Tempête parfaite en vue

Alors que les migrants continuent d’affluer sur ses côtes, la Grèce est de plus en plus sous pression pour gérer la crise des réfugiés tout en respectant ses engagements auprès de ses créditeurs. Y parviendra-t-elle ?

Publié le 17 février 2016 à 16:30
Yannis Behrakis/Reuters  | Des gilets de sauvetage abandonnés par des migrants sur une plage de l'île grecque de Lesbos, en octobre 2015.

Une tempête parfaite entre l’Europe et la Grèce se dessine à l’horizon, car l’afflux massif des réfugiés et des migrants contribue à l’émergence d’un mélange explosif que seuls les analystes aux idées les plus fantaisistes pouvaient prévoir.

Supposons que l’accord de Schengen soit temporairement suspendu et que l’Europe décide que ses frontières ne sont pas celles de la Grèce. Ceci ne va pas arrêter les migrants. Les spécialistes estiment que dans un tel cas de figure 500 000 personnes pourraient se retrouver bloquées en Grèce, sans pouvoir se rendre en Bulgarie ou dans l’Ancienne République yougoslave de Macédoine.

Aucun gouvernement grec ne serait en mesure de gérer une telle situation et, immanquablement, des milliers de réfugiés et de migrants atteindraient la frontière nord du pays. Même si la situation est maîtrisé, les Européens ne pourront pas rester les bras croisés en regardant en direct les milliers de réfugiés agglutinés au grillage sur la BBC ou CNN pendant des heures.

La chancelière allemande Angela Merkel et les autres dirigeants en ont parfaitement conscience. Néanmoins, ils doivent eux-mêmes faire face à une frustration croissante de leur opinion publique et à des changements brutaux dans leurs vies politiques intérieures. Apparemment, faire porter le chapeau à la Grèce arrange tout le monde.

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Evidemment, le gouvernement ne fait qu’empirer la situation. Au lieu de se lancer dans une quête solitaire à travers l’Europe pour plaider sa cause sur la crise des réfugiés, la Grèce doit chercher à renforcer le cadre existant en utilisant les meilleures ressources dont dispose le pays dans le domaine de l’organisation, de la sécurité et de la politique de l’immigration. Il y a des gens qui savent bien travailler – c’est ce qu’on voit à chaque fois qu’un gouvernement intérimaire est formé et que les partis se focalisent sur leurs propres affaires plutôt que sur celles de l’Etat.

En attendant, à Athènes, nous vivons dans notre propre petite bulle. Nous devrions pourtant apercevoir la tempête qui se fait de plus en plus ressentir à Berlin, Bruxelles et dans le reste de l’Europe. Personne n’est d’humeur – ou n’a le temps et la patience – de se pencher sur notre cas.

Nous voulons surtout empêcher de réduire le niveau des retraites et nos créditeurs – hormis le FMI – nous préviennent que le cela comporterait forcément un nouvel emprunt ou l’annulation d’une partie de la dette. Cependant, l’atmosphère dans les cercles politiques est telle que des décisions de ce genre sont impossibles.

La Grèce risque donc de se retrouver coupée du reste de l’Europe en raison de la crise des réfugiés d’une part et de la menace d’un Grexit si l’évaluation de la mise en œuvre du plan d’économies n’est pas concluante d’autre part. Les sirènes du populisme anti-européen vont une nouvelle fois tenter de séduire la société et le Premier ministre Alexis Tsipras.

Il pourrait être tenté par cette voie, même si elle serait désastreuse pour lui et le pays. Dans le reste de l’Europe toutefois, nombreux sont ceux qui pourront tomber sous le charme des sirènes du populisme anti-grec. Nous l’avons déjà vu par le passé : lorsque les sirènes du Nord et du Sud s’associent et qu’il manque un fort leadership fort, la tempête approche.

Traduit de l'anglais par Frédéric Schneider

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