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Au-delà de l’évolution des flux globaux vers l’Europe qui ont chuté depuis le pic de 2015-2016, la logique voudrait que soit instauré un mécanisme permanent de répartition des demandeurs d’asile entre pays européens.

Publié le 23 mai 2019 à 07:00

Jusqu’en 2015, la majorité des pays de l’Union a pu faire comme si le problème des arrivées de migrants sur le sol européen concernait les seuls pays riverains de la Méditerranée (Grèce, Italie, Espagne). Le règlement européen de Dublin, qui prévoit que le pays qui doit examiner la demande d’asile d’un exilé est le premier Etat membre par lequel il entre dans l’Union, donnait à cette indifférence une caution juridique.

Lorsqu’en 2015, les flux en provenance de Turquie ont soudain bondi, certains pays européens, emmenés par l’Allemagne, ont décidé de suspendre provisoirement l’application du texte pour accueillir ces migrants. Mais leur élan de générosité n’a pas été accompagné d’un effort de solidarité de toute l’Union. Les Etats membres se sont péniblement entendus sur un accord par lequel ils s’engageaient à accepter sur leur sol respectif un contingent de migrants arrivés en Grèce et en Italie.

Chacun a cependant appliqué ce texte comme il a voulu, voire pas du tout, à l’instar de certains pays d’Europe centrale et orientale. Après quoi, invoquant la nécessité d’éviter les noyades en Méditerranée, les pays de l’Union se sont employés à chercher des sous-traitants extérieurs qui bloquent les migrants avant que ceux-ci arrivent sur le sol européen et donc que les Etats membres aient à examiner leur demande d’asile.

C’est ainsi qu’ils ont signé en mars 2016 avec la Turquie un accord selon lequel, en échange de concessions financières notamment, celle-ci s’engageait à empêcher les migrants de quitter son territoire pour gagner la Grèce. Le succès numérique de cette méthode a incité l’Italie à équiper les garde-côtes libyens, dont les liens avec des trafiquants et des milices qui contrôlent des régions entières du pays sont ambigus, afin qu’ils rattrapent les embarcations de migrants quittant leur pays. De fait, les départs depuis la Libye ont chuté en 2018, et c’est vers l’Espagne que les migrants ont quitté l’Afrique en plus grand nombre l’an dernier.

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Au-delà de l’évolution des flux globaux vers l’Europe qui ont chuté depuis le pic de 2015-2016, la logique voudrait que soit instauré un mécanisme permanent de répartition des demandeurs d’asile entre pays européens. Mais cela supposerait de réformer le règlement de Dublin, ce à quoi s’oppose toujours la majorité des Etats membres, laissant de nouveau les pays riverains de la Méditerranée se débrouiller.

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