Couple participant à la gay pride de Gênes (Italie). Photo de Daameriva.

Les homosexuels ne sont pas à la noce

Presque partout en Europe, les couples de même sexe bénéficient de droits civils de plus en plus larges. Mais lorsqu'il s'agit de s'unir devant un maire, ils ne peuvent aller que dans cinq pays. Cafebabel.com dresse la carte des endroits "gay-friendly".

Publié le 17 juillet 2009 à 11:04
Couple participant à la gay pride de Gênes (Italie). Photo de Daameriva.

"Pour nous, pouvoir se marier avec notre partenaire du même sexe, c’est juste une question d’égalité avec les hétérosexuels ; avoir le choix de se marier où tu veux, si tu le veux. Dans mon pays, je n’ai pas le choix. C’est interdit", regrette Juris Lavrikovs, originaire de Lettonie et responsable de la communication à l’ILGA Europe, la fédération mondiale pour la défense des droits des lesbiennes, des gays, des personnes bisexuelles, des transgenres et intersexuées. L’ONG va publier fin juillet un document répertoriant les droits des homosexuels en Europe. Le constat est accablant. Sur 58 pays, seuls cinq autorisent le mariage des couples gays et lesbiens.

Les Pays-Bas ont été le premier pays à le reconnaître en 2001, suivis par la Belgique en 2003, par l’Espagne en 2005, la Norvège en 2008 et la Suède en avril dernier. Le gouvernement suédois est le premier à inclure dans sa législation l’interdiction de refus du mariage religieux pour les couples homosexuels. Les pasteurs ont le droit de refuser individuellement mais l’Eglise luthérienne a l’obligation de trouver un pasteur pour les couples souhaitant se marier religieusement. En Belgique, le mariage est même autorisé pour les étrangers, dès lors que l'un des époux est Belge ou qu'il réside dans ce pays. Cette reconnaissance a souvent donné lieu à de vifs débats. En Espagne par exemple, des évêques et représentants du Parti populaire (droite) s’étaient fortement mobilisés contre le projet de loi, organisant des manifestions dans les rues de Madrid.

"Partenariat civil"

Dans le reste de l’Europe, la situation est assez confuse. "Et attention, il ne faut pas faire comme les médias traditionnels qui séparent toujours les pays de l’Est et de l’Ouest de l’Europe", note Juris Lavrikos. "Des pays comme la République tchèque, la Slovénie, la Hongrie sont beaucoup plus tolérants que l’Italie et la Grèce." De nombreux pays, de peur de froisser l’opinion publique mais souhaitant s’engager dans la voie du progrès, proposent des alternatives au mariage homosexuel. Le Danemark a été le premier pays au monde à autoriser, le 1er octobre 1989, un "partenariat enregistré" entre homosexuels, qui donne les mêmes droits que le mariage, sauf à l'insémination et à l'adoption. La France a instauré en 1999 le PACS, le Pacte civil de solidarité. Une personne qui est pacsée peut bénéficier de la sécurité sociale de son partenaire et est responsable des dettes contractées par son conjoint en ce qui concerne les besoins de la vie courante et les dépenses de logement commun.

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En Allemagne, le contrat de vie commune accorde aux couples gays et lesbiens depuis le 1er août 2001 des droits similaires à ceux du mariage, sauf en matière fiscale et pour l'adoption. La loi portugaise reconnaît depuis 2001 les unions de fait des personnes en couple depuis plus de deux ans, indépendamment de leurs sexes. En Croatie, une loi sur l'union entre personnes de même sexe adoptée en juillet 2003 reconnaît uniquement le droit au "soutien mutuel" au sein du couple et le droit à la succession. Au Royaume-Uni, le "Civil Partnership", le partenariat civil, offre depuis le 5 décembre 2004, aux couples homosexuels, les mêmes droits qu'aux hétérosexuels.

En 2006, les députés tchèques ont reconnu un statut légal aux couples homosexuels, malgré le veto posé par le président Vaclav Klaus contre ce texte. En décembre 2007, le gouvernement hongrois de centre-gauche a adopté la loi de partenariat enregistré permettant aux couples gays et lesbiens de légaliser leur union. Le statut de "concubin" leur permet d'obtenir un crédit, de faire valoir des droits à un héritage et accorde des abattements fiscaux.

Mariages à la grecque

"Dans les autres pays, nous devons faire un travail d’éducation car l’opposition au mariage homosexuel est très forte", explique Juris Lavrikovs. En Pologne, en Grèce, en Lettonie, à Chypre, en Bulgarie et en Roumanie, près de 80 % de la population est contre le mariage gay et lesbien, selon un sondage publié en 2007 par la Commission européenne. "De plus, l’Union européenne ne peut rien faire en matière de droit de la famille", regrette Juris Lavrikovs. La Cour européenne des Droits de l’Homme, saisie à plusieurs reprises, estime que le fait de réserver le mariage seulement aux couples constitués d’un homme et d’une femme relève des prérogatives des lois nationales et ne constitue pas une discrimination. Malgré toutes ces réserves, certains hommes politiques défient les lois de leur pays pour faire avancer les choses. Un maire grec a célébré début juin 2008, pour la première fois, les mariages de deux couples homosexuels sur la petite île de Tilos (mer Egée), en profitant du fait que la loi sur le mariage civil, adoptée en 1982, ne précise pas que cette union doit être nécessairement contractée entre deux personnes de sexes opposés.

"Mais un autre problème se pose. Par exemple si un couple homosexuel se marie en Belgique et que l’un des conjoints obtient un travail en Pologne. S’ils décident d’emménager dans ce pays, leur union ne sera pas reconnue", déplore Juris Lavrikovs. Les activistes qui luttent pour l’égalité des droits entre homosexuels et hétérosexuels ont donc encore du pain sur la planche. Le combat est jeune. Le 17 mai 2005 fut organisée la première journée mondiale de lutte contre l’homophobie dans 40 pays. Seulement quinze ans plus tôt, l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, avait supprimé l’homosexualité de la liste des maladies mentales…

Séverine Lenglet

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