Roxana Coman / Evenimentul Zilei.

Le Kitsch, un style de vie

A travers une exposition d’objets et de photographies kitsch, les étudiants de la Faculté d’Histoire de Bucarest montrent en quoi l'adhésion des ex-pays communistes à l'UE a provoqué un "choc culturel".

Publié le 18 mai 2009 à 12:55
Roxana Coman / Evenimentul Zilei.

Une ancre-icône, une veilleuse-montre aux petits anges, des boîtes musicales et des fleurs en plastique ont été cataloguées kitsch par les auteurs de l’exposition "Le Kitsch, un style de vie". N’y ont pas échappé non plus le palais de Gigi Becali, patron du club de football Steaua Bucarest, avec son crucifix doré géant que l’on aperçoit au dessus de la clôture ni les casinos installés dans des bâtiments d’époque décorés de guirlandes lumineuses de Noël.

Mihaela Pop, conférencière à la Faculté de Philosophie de Bucarest, organisatrice de l’exposition en collaboration avec des étudiants de la Faculté d’Histoire de la capitale roumaine, considère que "le Kitsch induit un plaisir intellectuel facile en niant l’authenticité". Mais il a aussi une fonction sociale. "Les objets-kitsch sont choisis par leurs possesseurs pour souligner leur statut. On peut parler d’homme-kitsch, de mentalité-kitsch, basée sur le plaisir immédiat, sur la frénésie possessive, le désir d’avoir le plus d’objets possible", explique-t-elle encore.

L’exposition contient aussi des photos d’objets qu’on retrouve sur les stands des foires et des marchés : t-shirts et bracelets aux couleurs brillantes et criardes; bougies rouges avec des images de saints collées dessus, perroquets, lapins et assiettes ornées de l’image de la Sainte Famille ou encore les classiques angelots dodus. "Le Kitsch a quelque chose d'agressif, il tend à envahir tous les compartiments de notre vie qu’on le veuille ou non", estime Roxana Coman, étudiante en troisième année à la Faculté d’Histoire.

Mais il n’est pas seulement caractéristique de la société roumaine. "Ce style apparaît dans les périodes de changements sociaux rapides, comme chez nous après les années 1990. Les hommes de la société communiste ont dû, en quelques années, surmonter les défis auxquels les occidentaux ont été confrontés tout au long des 30 ou 40 dernières années", dit encore Mihaela Pop. "Il est clair que nous avons affaire à un choc entre deux cultures différentes, intervenu après l’adhésion à l’UE. C'est ce qui génère les phénomènes kitsch".

Le meilleur du journalisme européen dans votre boîte mail chaque jeudi

La solution devant l’avalanche de mauvais goût, selon Mihaela Pop, est d’adopter une attitude anti-kitsch, sur la base d'une culture sérieuse. L’exposition peut être visitée jusqu’au 2 juin, à la Faculté d’Histoire de l’Université de Bucarest.

Eurovision

La fête du mauvais goût

Les pays d'Europe orientale ne sont pas les seuls à céder aux sirènes du Kitsch. Une fois par an, l’Europe entière s’y met, à l'occasion du concours de l’Eurovision, affirme l’écrivain flamand Oscar van den Boogaard dans le quotidien De Standaard. "Chaque année, je me dis que l’on ne peut pas plus kitsch que ça, mais chaque année l’Eurovision me prouve le contraire". Dans cette "célébration ostentatoire du mauvais goût", Van den Boogaard voit une nouvelle tendance : "Plus personne ne semble être gêner d’aimer le kitsch (…) Mais l’image utopique de l’Europe que nous donne l’Eurovision, n’est-elle pas aussi kitsch que le concours lui-même ?"
Pour l'écrivain, le festival évoque aussi "ce que l’Europe pourrait être si les ambitions étaient au rendez-vous : un ensemble de cultures sur lequel le soleil ne se couche jamais, un grand empire qui s’étend de l’Océan Atlantique portugais jusqu’en Sibérie, de la Mer de Glace aux plages de la Mer Rouge". Mais l'Eurovision incarne "le désir enfantin d’un monde où tous chantent ensemble à tue-tête", même si le concours pourrait aussi avoir une influence politique, s'il "réussit à pousser les Européens à aller voter aux européennes".

Catégories
Tags
Cet article vous a intéressé ? Nous en sommes très heureux ! Il est en accès libre, car nous pensons qu’une information libre et indépendante est essentielle pour la démocratie. Mais ce droit n’est pas garanti pour toujours et l’indépendance a un coût. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à publier une information indépendante et multilingue à destination de tous les Européens. Découvrez nos offres d’abonnement et leurs avantages exclusifs, et devenez membre dès à présent de notre communauté !

Média, entreprise ou organisation: découvrez notre offre de services éditoriaux sur-mesure et de traduction multilingue.

Soutenez le journalisme européen indépendant

La démocratie européenne a besoin de médias indépendants. Rejoignez notre communauté !

sur le même sujet