Idées Agressions à Cologne

“Même pas peur”, mais jusqu’à quand ?

Publié le 19 janvier 2016 à 09:31

Des gens scandalisés, une polémique qui n’en finit pas. Pauvres réfugiés, pauvres immigrants, pauvres personnes agressées. Le début de 2016 n’annonce pas une année meilleure que 2015. Après l’assaut contre Charlie Hebdo, il y a un an déjà, en janvier 2016, les nouvelles ne s’améliorent pas.
En Syrie, les enfants mangent des feuilles d’arbres pour ne pas mourir de faim ; en Europe pour ne pas mourir de peur, il faut ne plus sortir de chez soi. Au moins pas sur une place centrale, dans une grande ville. C’est peut-être une conclusion erronée, mais combien d’entre nous ne l’ont pas en tête ? Selon les témoins des agressions survenues près de la gare centrale de Cologne, celles-ci auraient été commisses par des hommes d’origine arabe et nord-africaine. Combien d’Allemandes ne vont pas regarder avec peur, dans l’obscurité, quand un homme qui correspond à ce genre de description s’approche d’elles ? Combien d’Européennes parviendront-elles à oublier vite les 600 plaintes des victimes ? Et est-ce qu’il faut tout oublier et laisser la police trouver les coupables sans aucune autre réaction ? Combien pensent encore que le “politically correct” peut encore s’appliquer ? Est-ce qu’on doit vraiment éviter la publicité négative concernant les réfugiés, à tout prix ?
Je n’ai pas reçu en Roumanie, mon pays natal, les nouvelles à propos de ce qui est arrivé en Allemagne, mais en Espagne, où je passais mes vacances. Dans la rue d’un petit village à côté de Valence, des gens qui achetaient le journal se félicitaient près du kiosque pour leur vie, encore tranquille, "pas comme dans les grandes villes". Est-ce qu’il faut fuir les métropoles, ou se barricader chez soi, comme ultime solution ? Et ces journaux espagnols, feuilletés en hâte par un monsieur âgé, dont le visage devenait toujours plus sombre, en passant la page, montraient aussi comme les agressions sexuelles sont un phénomène qui commence dans les camps de réfugiés en Allemagne, avant de se propager dans les rues. Les femmes jeunes, les filles ont même peur d’aller aux toilettes en traversant le camp, à cause des hommes violents. Les mêmes qu’on peut après rencontrer dans la rue ? J’essaye de parler . Il se rend compte que je ne parle pas 'valencià', le catalan de la région et me demande si je suis espagnole. Je lui dis que je suis une Roumaine en vacances et il sourit disant que j’ai encore (?!) de la chance. "Dans les écoles ici, les noms des enfants ne sont déjà plus en majorité espagnols ou catalans. On s’est habitué aux gens d’ailleurs, vous n’êtes pas encore dans cette situation. Dans 20 ans on sera combien ?", demande-t-il de façon rhétorique, avec un sourire amer. "Au moins, c’est bien, les migrants économiques voulaient s’intégrer, leurs enfants allaient à l’école, mais là, si je lis les nouvelles, il ne me semble pas qu’il soit question d’intégration, mais juste du mépris pour ceux qui les ont accueillis." Il craint le présent, il craint l’avenir.
"Même pas peur" disait l’un des slogans après les tueries de Paris. Certes, c’est sans rapport avec ce qui s’est passé en Allemagne. Mais pour combien de temps on pourra ? Et de la peur à la haine, il y a un tout petit pas. Personne ne doit mourir de faim ou vivre dans la terreur, en Syrie. Personne ne doit mourir de faim ou vivre dans la terreur, en Europe non plus. Mais est-ce qu’il y a un moyen d’éviter les deux ? Ne devrait-on jamais évoquer la question de l’intégration pour ceux qui arrivent en Europe ? Parce qu’il est toujours plus clair que juste offrir l’asile, ce n’est pas assez.
Si la police a été incapable de contrôler les agressions de mille hommes sur une place publique, qu’est-ce qui se passera quand ils seront deux milles ? Ou dix milles ? On compte déjà en Allemagne plus d’un million de demandeurs d’asile. Peut être ni un 1% n’a d’intentions criminelles. Mais s’ils sont regardés avec un oeil craintif, l’insécurité aussi peut nourrir la haine. Qui pourra arrêter alors ce qui se passera dans les rues ? Et qui sera disponible pour assumer la responsabilité pour la dégradation des choses ? Trop de questions et si peu de réponses au début d’une année au début si affligeant.

Photo : Le parvis de la gare centrale de Cologne. Subperbass/Wikimedia Commons.

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