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Après que des sanctions ont été imposées par l'Union européenne sur les exportations d'engrais et de bois de Biélorussie, le volume de cigarettes de contrebande entrant en Lituanie a diminué de manière significative. Selon les données des douanes lituaniennes, les produits du tabac de contrebande interceptés entre la Biélorussie et la Lituanie ont été multipliés par 2,5 en 2022. Ces dernières années, la contrebande de cigarettes confisquées a connu une croissance exponentielle. En 2019, 8,6 millions de paquets de cigarettes ont été interceptés à la frontière. En 2020, ils étaient deux fois plus nombreux (16,88 millions) ; et en 2021, 22,4 millions. Pourtant, en 2022, le volume de cigarettes de contrebande est retombé au niveau de 2019.
Pour les fonctionnaires des douanes, le nombre a diminué parce que la liste des sanctions européennes comprend des marchandises dans lesquelles les cigarettes sont traditionnellement cachées – le bois et ses dérivés.
Malgré les sanctions et les scandales, le bois biélorusse entre toujours dans l'UE. Si les autorités biélorusses ont bien réorienté une partie des exportations vers la Chine – les livraisons de bois y ont augmenté d'un tiers en 2022 – mais une partie du bois continue d'arriver dans l’Union.
Des granulés de bois biélorusses qui finissent en Europe
Il apparaît que les sanctions sur le bois biélorusse ont été le catalyseur de nouvelles opportunités financières pour plusieurs hommes d'affaires.
Par exemple, l'entreprise polonaise PLRBL qui, – sur le papier – travaille dans le secteur de la construction en Europe de l'Est et a terminé l'année 2020 en perte de plus de 70 000 euros. Quelques mois après la sanction européenne concernant le bois biélorusse, en août 2022, elle a signé un contrat avec la société kirghize Admit pour la fourniture de granulés de bois. Jusqu'en décembre 2023, cette dernière s'est donc engagée à fournir à PLRBL des matériaux combustibles d'une valeur de 1,5 million d'euros.
Cela ne poserait pas de problème si le bois utilisé pour fabriquer les granulés n'était pas acheté en Biélorussie puis vendu à l'UE – ce qu’un cadre de PLRBL, le Biélorusse Vital Leshyk, ne cache même pas.
Nos collègues polonais de Frontstory.pl, prétextant etre des acheteurs, ont organisé une rencontre avec Leshyk, le directeur exécutif de la société PLRBL. Celui-ci s'est donc rendu de Biała Podlaska (ville de l’est du pays, proche de la frontière biélorusse, ndlr.) à Varsovie pour y rencontrer ses “clients potentiels”. Au cours des négociations, Leshyk a laissé entendre qu'il pouvait aider les clients à acheter des granulés biélorusses.
Mais même avant de rencontrer Leshyk, des recherches préliminaires laissaient penser que PLRBL était impliquée dans des projets louches. Par exemple, ce contrat de transport international de la société Kyrgyz Admit concernant les granulés en question. Il indique qu'un camion aurait été chargé de plus de 22 tonnes de granulés de bois le 14 octobre 2022 à Bichkek (la capitale kirghize, ndlr.). Huit jours plus tard, les douanes biélorusses signent le contrat à leur tour, signifiant que la cargaison a franchi la frontière biélorusse. D'après les documents concernant la commande, la cargaison a été livrée en Biélorussie par la société de transport Euro-2006, basée à Minsk. En Lituanie, les granulés de bois ont été transportés jusqu'à l'entrepôt de Vivalsa à Vevis par le transporteur local Versatio. Ce transport a été effectué par l'intermédiaire de PLRBL.
La déclaration de marchandises a été signée par les douaniers kirghizes et le certificat d'origine a été délivré par la Chambre de commerce et d'industrie d'Osh, au Kirghizstan.
PLRBL fait des affaires non seulement en Pologne et en Lettonie, mais aussi au Kirghizstan et au Kazakhstan, selon son dirigeant. Ils achètent du bois en Biélorussie et l'expédient au Kirghizstan ou au Kazakhstan, où il est transformé en granulés. Des documents sont ensuite créés de toutes pièces pour faire croire que les matières premières proviennent du Kirghizstan ou du Kazakhstan.
Nous avons également appelé un représentant de PLRBL en Biélorussie en nous faisant passer pour un client. Un homme prénommé Aleh Yanovich nous a répondu et a confirmé que la société fournissait bien des granulés – tout en refusant de nous donner des détails par téléphone, expliquant qu'il craignait d'être "piégé".
Nous identifiant comme journalistes, nous avons ensuite contacté le propriétaire de PLRBL, Sergejs Azubins. Lui déclare ne pas connaître les détails de chaque transaction, mais nie les allégations selon lesquelles sa société aurait violé les sanctions européennes, précisant que son entreprise a mis en place des mesures anti-sanctions.
