Le 13 février dernier, les habitants du canton de Berne, appelés à se prononcer sur la construction d’une nouvelle centrale nucléaire dans la banlieue de la capitale, à Mühleberg, glissaient un "oui" timide dans l’urne (51,2%). Moins d’un mois plus tard, le 11 mars, un tsunami ravageait les réacteurs de la centrale de Fukushima, sur la côte est du Japon. L’onde de choc japonaise s’est déployée jusqu’à la Suisse centrale. Malgré l’acceptation exprimée par une majorité du peuple, il y a fort à parier que le nouveau réacteur ne verra pas le jour à Berne.
Le moratoire suisse sur les centrales nucléaires, décrété par la ministre de l’Environnement Doris Leuthard suite à la catastrophe, est passé quasi inaperçu à l’étranger. La même décision prise par Angela Merkel a en revanche suscité l’incompréhension de nombreux observateurs européens, accusant la chancelière d’agir dans la précipitation électoraliste. Comme en Allemagne, "le vent a bien tourné sur la question nucléaire", observe l’Agence télégraphique suisse. Les Suisses seraient désormais 87% à souhaiter la sortie de l’atome, selon un sondage du Matin Dimanche.
Un revirement momentané sous le coup de l’émotion ? Plutôt l’accélérateur d’une tendance de long terme. De même que la crise de l’euro a érodé l’image déjà passablement dégradée de l’Union européenne en Suisse, l’accident de Fukushima a été la goutte qui a fait déborder le vase en ce qui concerne le nucléaire. "Cette votation n’est qu’une étape", reconnaissait en février Philippe Perrenoud, président du gouvernement bernois. Le scrutin de Mühleberg mettait en avant la "progression des antinucléaires", traduisant la volonté populaire de voir se développer les énergies renouvelables. Manquait encore la lame de fond. Nous y sommes.
Photo: David Gallagher