Revue de presse Lumière sur le sud-est

L’Europe du Sud-Est s’embrase : de vastes manifestations menacent les gouvernements en Serbie, en Roumanie et en Turquie

Peu avant Noël, des dizaines de milliers de Serbes, de Roumains et de Turcs sont descendus dans la rue pour défier leurs gouvernements. Les manifestants ne décolèrent pas en ce début d’année. Mais quelles sont leurs revendications ?

Publié le 15 janvier 2025

“Ce soir, la nouvelle année civile commence, mais pour nous, elle commencera lorsque toutes les revendications de la mobilisation étudiante seront satisfaites”, ont annoncé les étudiants de l'université de Novi Sad, en Serbie, la veille du Nouvel An, devant des milliers d'autres citoyens, comme le rapporte Aleksandar Latas pour le quotidien serbe Danas. Les manifestations, menées par les étudiants eux-mêmes, ont débuté voilà plusieurs semaines, en novembre, après l'effondrement du toit en béton de la principale gare de Novi Sad, qui a fait 15 morts.

Des agriculteurs aux professeurs, en passant par les musiciens et les prêtres, des citoyens de tous horizons ont manifesté leur solidarité avec la jeunesse rebelle. L'une des plus grandes manifestations s'est déroulée le 22 décembre, lorsque des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées contre le gouvernement populiste du président serbe Aleksandar Vučić (SNS, droite), comme le montre la “Photo du jour” du média bulgare Kapital. Dans Danas, l'ancien maire de Belgrade et ambassadeur de Serbie Milan St. Protić décrit Vučić comme étant “coupable de la chute du toit de Novi Sad et de la mort de quinze personnes innocentes. Vous êtes le plus coupable et le premier accusé. Les autres coupables ont obéi à vos ordres. [...] Leur culpabilité vient après la vôtre et découle de la vôtre.

Selon le même journal qui cite l’interview de Vučić à la radio publique serbe RTS, le président pense que les étudiants recherchent des “solutions anti-système” et qu’“il a discuté avec les enseignants mais n'a pas pu parvenir à un accord parce que les représentants syndicaux ont changé leurs revendications”. Par ailleurs, le Premier ministre serbe Miloš Vučević souligne que “les professeurs qui ne veulent pas enseigner ne travailleront plus dans le secteur de l'éducation, tandis que les étudiants qui ne viennent pas en cours seront sanctionnés pour absences injustifiées.

Les Roumains se mobilisent pour la reprise de l’élection présidentielle

Après l'annulation par la Cour constitutionnelle roumaine du premier tour de l'élection présidentielle, qui s'est tenu le 24 novembre, de petits groupes de citoyens ont organisé des manifestations sporadiques. La coalition d'extrême droite Alliance pour l’unité des Roumains (AUR) a organisé une grande manifestation le 12 janvier “contre la décision abusive du régime dirigé par Klaus Iohannis”, comme l'indique le communiqué de presse de l'AUR repris par Andrei Stan sur HotNews. “Des dizaines de milliers de Roumains de tout le pays et de la diaspora se rassembleront pour exiger le respect de leur vote, la reprise du second tour [des élections présidentielles], mais aussi la chute du régime de Iohannis”.

Le manque de transparence de la décision de la Cour constitutionnelle est l'une des raisons qui ont conduit aux manifestations. Le média d'investigation roumain Context a tenté d'obtenir les documents qui permettraient de clarifier l'arrêt de la Cour, mais sans succès. “L'administration de Iohannis refuse de fournir des documents essentiels relatifs aux élections présidentielles annulées par la Cour constitutionnelle”, écrit Attila Biro, cofondateur de Context.

Déçue par une augmentation de salaire, la Turquie manifeste

À la veille de Noël, le ministre turc du Travail et de la Sécurité sociale, Vedat Işıkhan, a annoncé que le salaire minimum en Turquie augmenterait de 30 %, pour atteindre 22 107 lires (soit 603 euros) en 2025. “Puisse [cette mesure] être bénéfique pour notre pays et notre nation”, a lancé le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdoğan peu après l'annonce, comme le rapporte le quotidien turc Cumhuriyet. “En 2025, il ne sera pas possible de joindre les deux bouts avec ce salaire minimum, il y aura des élections”, a pour sa part prédit le leader du CHP (Parti républicain du peuple ; centre-gauche à l'opposition), Özgür Özel, après avoir rendu visite à la Confédération des syndicats turcs. “C'est un désastre. Mais nous ne nous laisserons pas décourager. Nous nous battrons et [...] nous obtiendrons des gains importants. La victoire la plus importante [réside dans le fait] que ce gouvernement anti-social a rapidement disparu du cœur et des yeux des gens. Il quittera également le pouvoir lors des prochaines élections”, promet Özel, cité par le journal turc Habertürk.

La Confédération des syndicats turcs exigeant une augmentation de salaire de 74 % et l'inflation risquant de rester élevée, des grèves pourraient être déclenchées à l’avenir. Des milliers de personnes se sont déjà rassemblées à Ankara pour protester et appeler le gouvernement à démissionner, comme le rapporte Huseyin Hayatsever dans Reuters. “Le nouveau salaire minimum est l'aveu de l'équipe économique du gouvernement que son programme de lutte contre l'inflation ne fonctionne pas”, conclut le journaliste William Sellars de la plateforme d'informations économiques Arabian Gulf Business Insight, après s'être entretenu avec le professeur Emre Alkin, économiste et doyen de l'université Topkapı d'Istanbul.

La Bulgarie et la Roumanie deviennent des membres à part entière de l’espace Schengen

Sur une note plus positive, la Bulgarie et la Roumanie sont devenues membres à part entière de l'espace Schengen le 1er janvier 2025, lorsque leurs frontières terrestres extérieures ont été levées. “L'Académie bulgare des sciences estime à environ 1,6 milliard de leva (818 millions d'euros) par an les avantages que la Bulgarie tirera de son entrée dans l'espace Schengen. Ils se feront sentir dans tous les domaines – dans l'économie, dans les déplacements, dans le tourisme et surtout pour les transporteurs”, s’est enthousiasmé le Premier ministre bulgare Dimitar Glavchev, cité par Lily Granitska dans Mediapool.bg.

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