Qui veut suivre Merkel et Sarkozy ?

Réunis à Paris le 5 décembre, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy se sont mis d’accord sur un plan censé sauver l’euro de la catastrophe. Ils demandent aux Vingt-Sept de l’approuver lors du sommet des 8-9 décembre. Mais ce n’est pas gagné, estime-t-on hors de France et d'Allemagne.

Publié le 6 décembre 2011 à 15:48

L'accord entre le président et la chancelière prévoit notamment une réforme des traités européens visant à introduire le principe de la rigueur budgétaire, et de sanctions "immédiates" et "automatiques" pour les Etats dont le déficit dépasserait 3% du PIB. Paris et Berlin réclament également l’instauration d’une "règle d’or renforcée et harmonisée au niveau européen", afin que chaque pays puisse mettre en place des mécanismes de garantie quant au respect de l’objectif de l’équilibre budgétaire. Pendant ce temps, l’agence de notation Standard & Poor’s a annoncé avoir mis "sous surveillance négative" plusieurs pays de la zone euro, y compris les six triple A.

A Madrid, El País qualifie l’accord de “bancal”, car “insuffisant” dans l’ensemble "discutable" dans chacun des ses aspects, notamment parce que le partage des responsabilités est totalement absent :

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Il n’est pas suffisant parce que Merkel et Sarkzoy ne dessinent pas, malgré leur propos, une union fiscale […], et ils ne font que mettre l’emphase sur la discipline budgétaire. Une reforme du traité sous la menace ne concernerait que la zone euro en cas de boycott de quelques-uns et met la pression sur tous ; mais elle ouvre aussi la boîte de Pandore d’interminables et paralysantes discussions byzantines : les traités actuels ont coûté 10 ans. Mais les carences les plus importantes sont dans le flou des mécanismes urgents pour affronter la crise. On fait à peine référence à la mise en place anticipé du Fonds de sauvetage définitif (le Mécanisme européen de stabilité, MES) à juin 2012, [il y a] un silence retentissant sur le rôle indispensable de la BCE et un regrettable refus des euro-obligations. Une maigre récolte : si elle n’est pas améliorée lors du sommet [des 8-9 décembre], la joie des marchés ne durera pas – El País

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“Berlin l’a emporté”, note pour sa part La Stampa. Si le quotidien turinois apprécie que Merkel et Sarkozy aient reconnu l’autonomie du patron de la Banque centrale européenne Mario Draghi, il regrette que l’accord entre les deux se soit fait au détriment des euro-obligations, les fameux emprunts d’Etat européens. Pour le reste, “il n’y a rien de nouveau”:

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Ce qui frappe le plus, c’est ce dont ils n’ont pas parlé : de la BCE dont Sarkozy veut qu’elle intervienne plus activement et dont Merkel veut qu’elle se tienne à son rôle de stabilisation. – La Stampa

Côté portugais, Jornal de Negócios note que :

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Ceux qui connaissent l’Europe savent que Merkozy a tracé un chemin incertain pour remporter la bataille contre un effondrement immédiat de l’euro, mais ils ont ravivé les plaies, ouvertes lorsque la crise a éclaté en 2010, au sein de la souveraineté et de la démocratie des pays européens et de l’UE. – Jornal de Negócios

Son confrère Público estime pour sa part que

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L’Allemagne se prépare à germaniser l’Europe (…) Même en acceptant l’idée qu’il faut “renforcer et harmoniser” l’intégration fiscale et budgétaire dans la zone euro, les exigences du couple Merkozy font penser à des réparations de guerre.Des exigences et encore des exigences aux perdants et aux affligés, mais rien qui ne demande de l’effort, de l’argent et de la solidarité. – Público

L’estonien Postimees regrettepour sa part qu’une fois encore, “les chefs d’Etats de l’UE ont affaibli les insitutions européennes” :

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Toute l’action de sauvetage de la zone euro est coordonnée à travers le Conseil européen alors que cette institution n’a jamais été un organe de gouvernance démocratique. Il faudrait donner plus de voix au Parlement. Le retour vers l’Europe des nations voudrait dire aussi un retour en arrière en matière de gouvernance démocratique et serait sur le plan de la politique mondiale plusieurs fois plus catastrophique que le 11 septembre 2001 ou les guerres en Irak et en Afghanistan. – Postimees

En dehors de la zone euro, le sceptiscisme est également de mise. Ainsi, à Bucarest, Adevărul constateque la nouvelle Europe “ne sera pas parfaite et ne ressemblera pas à un poème” :

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Au-delà des raffinements de la politique française, l’Europe poursuit son chemin, arrimée à l’Allemagne (…) Tout s’articulera autour du noyau dur de la zone euro, et les autres pays, qui n’en font pas partie, devront batailler pour suivre la cadence. La Roumanie, la Pologne, les pays baltes le feront, car c’est dans leur intérêt. Il n’y a pas d’autre choix. – Postimees

Pour Rzeczpospolita enfin, l’accord entre Merkel et Sarkozy sur une Union de la stabilité n’est en rien une avancée ou une révolution, mais une “vieille Union, enlisée dans les compromis” :

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Si l’on pouvait dessiner le mot “compromis”, il y a longtemps qu'on l’aurait mis sur le drapeau de l’UE à la place des étoiles. Et on ne se demanderait pas aujourd’hui quelle étoile va tomber la première. Mais même là, un compromis peut être trouvé. Et on va très certainement découvrir qu’il est parfaitement possible de faire partie de l’UE tout en étant à l’extérieur. – Rzeczpospolita

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