Un arnaqueur dévoile rarement ses secrets, surtout s'il a fait l'objet d'une condamnation pénale. Mais il est vrai que le négociant en vins français Jean-Sébastien Laflèche n’est pas un fraudeur comme les autres. Travaillant dans le secteur vinicole depuis l'âge de 18 ans, il connaissait déjà toutes les ficelles du métier lorsqu’il a pris la tête de la plus grande escroquerie aux vins de l'histoire de Bordeaux.
En janvier 2023, cet homme de 57 ans a été condamné par un tribunal de Bordeaux, avec quatre autres personnes, pour une fraude de grande envergure consistant à faire passer des millions de litres de vin espagnol bon marché pour du vin français, qu'il s'agisse de vin de table ou d'appellations bien connues, comme le margaux et le médoc.
Jean-Sébastien Laflèche a écopé de deux ans d'emprisonnement, dont un avec sursis. Il a purgé sa peine résiduelle, soit un an, sous bracelet électronique et n’a donc pas passé un seul jour en prison.
Dans une interview accordée à Voxeurop, il indique n’avoir eu aucune difficulté à organiser l’affaire. “Il suffit d'acheter du vin espagnol en vrac et de le mélanger. Ensuite, vous travaillez avec une grande cave, vous décrochez un contrat avec une grande chaîne de magasins ou de supermarchés et vous leur vendez des bouteilles étiquetées ‘Vin de France’”, explique le Français, qui a également été condamné à une amende de 235 000 euros avec interdiction de travailler dans le secteur vinicole pendant cinq ans. De toute façon, ajoute-t-il, “comment voulez-vous qu'un distributeur se rende compte qu’il s'agit d'un vin trafiqué ?”
L'escroquerie s'est déroulée entre 2014 et 2016 – une période de mauvaises récoltes – et a totalisé non moins de 34 587 hectolitres de vin espagnol en vrac, soit l'équivalent d'environ 4,5 millions de bouteilles. Le vin contrefait était ensuite vendu à des magasins et à des restaurants, non seulement en France mais aussi dans toute l'Europe et plus loin encore, par un producteur de vin de Bordeaux qui s’était fait le complice de Laflèche.
Un rapport de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) constate les faibles rendements des vignobles, désormais très courants au sein de l’UE, notamment du fait des mauvaises conditions météorologiques observées ces dernières années, en particulier en France. L’année dernière, la production de vin dans l'Union européenne a atteint son niveau le plus bas depuis 2017, soit 146,5 millions d'hectolitres, selon les données de la Commission européenne.
Depuis les années 1980 et la financiarisation de l’économie, les acteurs de la finance nous ont appris que toute faille dans la loi cache une opportunité de gain à court terme. Les journalistes récompensés Stefano Valentino et Giorgio Michalopoulos décortiquent pour Voxeurop les dessous de la finance verte.
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