Idées Le Brexit vu par la Britannique Madeleina Kay/EU-Supergirl

“Avec la crise du Covid et le Brexit, je me sens emprisonnée sur cette île”

Madeleina Kay, alias EU-Supergirl, artiste et activiste pro-européenne, raconte combien elle se sent à la fois horrifiée et préoccupée par la façon dont le gouvernement britannique gère simultanément la pandémie et les négociations liées au Brexit. Après une campagne éprouvante contre le vote profondément préjudiciable du Brexit, elle se retrouve impuissante, piégée et très inquiète pour l’avenir de son pays.

Publié le 8 décembre 2020 à 16:49

Après trois ans et demi d’impasse politique, de bouleversements et de chaos au Royaume-Uni, le Brexit a enfin été “obtenu” le 31 janvier 2020. Boris Johnson n’a recueilli  que 43,6% des voix, mais dans le cadre du système électoral britannique “First Past the Post” (scrutin uninominal majoritaire à un tour, NDT), cela lui a été suffisant pour gagner haut la main et ainsi passer son accord de Brexit. Grâce à son slogan soigneusement pensé par ses conseillers politiques, “Get Brexit Done”, Johnson a remporté les votes de Britanniques lassés et frustrés par cet interminable Brexit. Mais le plus gros inconvénient de cette promesse électorale, c’est qu’un an plus tard, le Brexit est encore loin d’être terminé et que les véritables effets ne commenceront à se faire sentir qu’après le 31 décembre, lorsque la période de transition prendra fin. Bon nombre de ceux qui ont voté sans trop réfléchir aux conséquences en faveur du Brexit ne comprendront pas vraiment les conséquences de leur départ de l’UE tant qu’ils n’auront pas personnellement fait l’expérience des complications administratives et des dépenses inutiles. 

Comme 80% des gens de ma tranche d’âge, j’ai voté en défaveur du Brexit, et ce ne sont pas seulement les pertes financières, sociales, politiques et environnementales du départ de l’UE qui me préoccupent, mais également les pertes d’opportunités : en votant pour le Brexit, les Britanniques qui ont eux bénéficié de financements et de libertés ont retiré ces droits et privilèges aux jeunes générations. ERASMUS+ est le programme le plus populaire de l'UE ; je l'ai constaté moi-même lorsque j’ai publié mon affiche “24 raisons de rester”, ERASMUS+ est celle qui a eu le plus de likes. Nombre de mes abonnés ont d’ailleurs partagé leur expérience personnelle rendue possible uniquement grâce au financement de l’UE. Issue d’une famille d’universitaires, je suis très consciente de l’impact que le Brexit aura sur les établissements britanniques d’enseignement de renommée mondiale. Après tout, la recherche universitaire dépend des échanges de connaissances au-delà des frontières. Nous assistons aujourd’hui à l’annulation de financements, à la rupture de partenariats transnationaux, au départ de ressortissants de l’UE et à la baisse des candidatures d’étudiants d’autres pays européens.

Personnellement, je suis également préoccupée par la perte de financement dans le domaine des arts et des opportunités de collaborations culturelles internationales. J'ai récemment fait l'expérience quelque peu ironique de me renseigner sur une résidence d'artiste à Berlin sur le thème des "Voix de la migration", pour me faire dire que la candidature n'était ouverte qu'aux artistes des pays de l'UE et de l'EEE. 

Pendant la période de transition que nous avons eue entre le 24 juin 2016 et le 31 janvier 2019, j’ai fait, comme des millions d’autres militants du “Remain”, tout mon possible pour éviter cette catastrophe politique en appelant à un second référendum. Les médias britanniques nous reprochaient sans cesse d’être “antidémocratiques”, mais lorsque la Commission électorale a déclaré que la campagne “Leave” enfreignait la loi, je me suis forgé un avis très cynique de la corruption et du caractère manipulable de notre soi-disant démocratie britannique. Le jour des célébrations du Brexit, un homme s’est approché de moi près de la station de métro de Westminster et m’a crié au visage : “Tu as gâché trois ans et demi de ta vie ! Ils rentrent tous chez eux maintenant !”. Et il avait raison.

Le meilleur du journalisme européen dans votre boîte mail chaque jeudi

C’était peut-être une démarche vaine, mais je ne pense pas que nos efforts aient été entièrement gaspillés. Je suis très reconnaissante d’avoir pu porter mon message à tr…

Tags

Média, entreprise ou organisation: découvrez notre offre de services éditoriaux sur-mesure et de traduction multilingue.

Soutenez le journalisme européen indépendant

La démocratie européenne a besoin de médias indépendants. Rejoignez notre communauté !

sur le même sujet