Parlement européen
"ACTA : victoire de la démocratie européenne"

Le rejet d’ACTA, une victoire à double tranchant

En rejetant l’Accord commercial sur la contrefaçon (ACTA), les eurodéputés ont prouvé qu’il sont sensibles aux humeurs de l’opinion publique, se félicite la presse européenne, qui s’inquiète de la remise en question des principes de la propriété intellectuelle.

Publié le 5 juillet 2012 à 13:17
"ACTA : victoire de la démocratie européenne"

*“ACTA est mort, le Parlement se réveille”***, se réjouit Mediapart. Pour le site d’information français,**

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le rejet de l'accord anticontrefaçon marque symboliquement une étape dans la repolitisation de l'Europe. Perçu comme une structure lointaine et complexe, volontiers procédurier, avançant à pas minuscules de déclarations en avis, avec peu de tribuns identifiables [...]. Avec le rejet d'ACTA, il montre qu'il est une voie de recours possible pour des citoyens mobilisés. [Toutefois], la montée en puissance du législateur européen semble limitée aux questions de libertés publiques et de protection du citoyen. Sur d’autres débats européens, les eurodéputés demeurent inaudibles. [...] Rien ne dit que cet engouement [des citoyens] persistera sur des sujets plus techniques, plus lointains, et qui constituent pourtant l’essentiel du travail du Parlement.

Dans Gazeta Wyborcza, l’éditorialiste Ewa Siedlecka salue la chute d’ACTA comme “une grande victoire de la société civile” et assure que “le peuple européen” a ainsi manifesté son existence.

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Sous la pression, les politiciens qui avaient préparé et soutenu l’accord l’ont fait tomber […] Mais ACTA a aussi montré le visage le plus laid de l’UE. L’accord a été élaboré au sein de la Commission d’une manière absolument opaque. Tout était basé sur des négociations secrètes avec les Etats-Unis et le Japon.

Pour Rzeczpospolita, “le vote du Parlement européen prouve qu’ACTA dans sa forme actuelle est mort”. Néanmoins, souligne le quotidien,

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Les protestations des internautes ne veulent pas dire qu’ACTA n’a pas de supporters. Environ 130 organisations regroupant des auteurs et des médias se sont exprimées en faveur de l’accord. […] La fin d’ACTA ne veut pas dire que l’UE va renoncer à un accord pour protéger la propriété intellectuelle. Le monde des affaires et les auteurs subissent des pertes importante chaque année à cause de la piraterie sur le web et de l’importation de produits de contrefaçon.

*“Mauvaise nouvelle pour les éditeurs à propos du droit d’auteur”***, estime Edoardo Segantini dans le Corriere della Sera :**

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Encore une fois, les politiciens européens ont été sensibles aux raisons d’un vague “peuple du web”, derrière lequel se cachent les intérêts bien plus précis de ceux qui veulent continuer à gagner de l’argent sans investir, en profitant de la propriété intellectuelle des autres. Celle d’une industrie, de l’édition et de la musique, qui représente 120 millions d’emplois en Europe. […] Le populisme des politiciens n’est pas le seul aspect surprenant : l’autre, c’est la sympathie évidente — voire le soutien — que les voleurs de copyright continuent de susciter auprès des mêmes médias qui sont, au fond, leurs victimes.

La Frankfurter Allgemeine Zeitung, de son côté, déplore une “victoire de la meute” :

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La meute s’est jetée sur ACTA et a gagné (...) L’arrogance grégaire des cyber-fétichistes, cette “communauté de la toile” idéalisée et sacralisée, a voulu empêcher un précédent qui signifiait qu’enfin serait garanti par l’Etat ce que seul l’Etat peut garantir : le droit. La manière avec laquelle le gouvernement allemand, le parlement [allemand] et maintenant le Parlement européen se couchent devant la désinformation et l’intimidation de cette communauté de la Toile est pitoyable. Pire encore, cette agitation contre le droit et la loi est célébrée comme une nouvelle forme de démocratie, et chaque remarque sur le caractère totalitaire des masses numériques est décriée comme étant du “lobbyisme”. Mais qu’est-ce qui s’est imposé face à ACTA, sinon un lobby à la hussarde ?

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