L'Empire des normes

Publié le 15 avril 2011 à 10:24

La Commission européenne n'a pas chômé ces derniers jours. Le 13 avril, elle présentait son projet de relance du Marché unique, l'un des piliers essentiels de la construction européenne, et de création d'un brevet européen. Le même jour, elle détaillait son plan pour une "taxe carbone", dont le but est entre autres d'augmenter le prix du charbon et du diesel pour en faire baisser la consommation. Le 14, elle signait un accord avec les Etats-Unis sur la lutte contre la cybercriminalité. Le 11, elle avait annoncé des mesures pour améliorer les droits des passagers aériens. Et le 13, elle trouvait le temps d'infliger 315 millions d'euros d'amende aux producteurs de lessive en poudre pour entente illicite.

Pendant ce temps, le 11 avril, les ministres de l'Intérieur réunis à Luxembourg étalaient leurs désaccords sur la manière de traiter les immigrés, principalement Tunisiens, qui arrivent sur l'île italienne de Lampedusa, avec un but, aller ailleurs, principalement la France ou le Royaume-Uni. Et en fin de semaine, réunis à Berlin pour une réunion de l'OTAN, les Etats de l'UE membres de l'Alliance atlantique ont continué à s'opposer sur la conduite des opérations militaires en Libye. Le 14, Catherine Ashton était au Caire pour une conférence sur la Libye, mais elle ne porte aucune voix commune. En Europe même, l'Allemagne recommence à douter de son rôle dans le soutien à la zone euro, et personne ne sait comment aider le Portugal, qui est pourtant le dernier rempart avant la faillite de l'Espagne voire de l'Italie.

Au début des années 2000, lorsque l'Union européenne était sur le point de s'élargir à 10 nouveaux membres, espérait encore se doter d'une Constitution et vivait ses dernières années d'avant la crise, elle projetait l'image d'une zone dynamique, capable de définir des normes internationales. C'est l'époque où le géant Microsoft était condamné par Bruxelles pour abus de position dominante. Les règles sociales, écologiques ou commerciales définies par l'Europe pouvaient s'imposer au monde entier.

Cela pourrait être encore le cas. Mais aujourd'hui, comme le démontre à l'excès le déroulement de la semaine écoulée, l'UE est divisée et de moins en moins capable de peser face aux autres acteurs politiques, économiques ou commerciaux de la mondialisation. L'Europe continue donc de produire des règles, des plans et des jugements, mais sans dynamique politique, elle court le risque de ne devenir qu'une puissance normative. Un Empire bureaucratique.

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