Après la condamnation ferme par les plus hauts représentants européens des attentats du 7 octobre et son approbation du droit d'Israël à l'autodéfense, un malaise s’est comme immiscé dans les discussions entourant les actions brutales de l'armée israélienne à Gaza et dans les territoires occupés. Un sentiment qui apparaît évident aujourd’hui, même parmi les plus fidèles alliés de l'Etat juif en Europe centrale. Avec en toile de fond des scènes saisissantes de destruction à grande échelle, des milliers de victimes et l'effondrement complet des services essentiels dans cette enclave palestinienne, des appels sont désormais lancés en faveur d'une enquête internationale sur d'éventuels crimes de guerre.
"Ce n'est pas de l'antisémitisme que d'accuser Israël de faire la guerre à Gaza et en Cisjordanie en violation du droit international", écrit Markus Michaelis dans Die Tageszeitung. Pour le quotidien allemand indépendant, "la culpabilité de l'Allemagne à l'égard des Juifs n'est pas amoindrie par le fait que le gouvernement allemand garde le silence sur la violation du droit international par le gouvernement de droite à Gaza et en Cisjordanie et sur la suppression des voix dissidentes". Wolfgang Kaleck, avocat allemand spécialisé dans les droits humains, va encore plus loin dans son article paru dans le Tagesspiegel, appelant à une enquête de la Cour pénale internationale afin d'éviter le deux poids, deux mesures : "L'accusation de La Haye devrait appliquer les mêmes normes au conflit de Gaza qu'à l'Ukraine", rappelant qu'après le début de l'agression russe, La Haye avait immédiatement envoyé des spécialistes pour enquêter sur les crimes de guerre présumément commis sur le sol ukrainien. Les pays occidentaux "ont également l'obligation politique d'enquêter sur les allégations de crimes internationaux – non seulement contre leurs adversaires politiques tels que la Russie ou le Hamas, mais aussi contre des alliés tels qu'Israël", conclut Kaleck, qui craint que l'Occident ne perde sa légitimité s'il ne se penche pas sur la situation au Moyen-Orient.
En République tchèque, traditionnellement un soutien inébranlable d'Israël qui réunit à la fois la gauche et la droite, les voix qui critiquent l'usage disproportionné de la force à Gaza gagnent aujourd'hui du terrain. "Notre approche d'Israël est similaire à celle des supporters de football, caractérisée par une ferveur sans esprit critique. Mais il n'est pas dans notre intérêt de lui laisser une marge de manœuvre incontrôlée", écrit Ondřej Houska dans Hospodářské noviny, avertissant qu'une nouvelle escalade pourrait conduire à une guerre à grande échelle au Moyen-Orient, drainant ainsi les ressources que l'Occident pourrait fournir à l'Ukraine. Le quotidien rappelle que la guerre russo-ukrainienne est bien plus importante pour les Tchèques : la défaite de l'Ukraine signifierait la présence de chars russes aux frontières de la Pologne et de la Slovaquie.
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