Revue de presse Cap Nord-Ouest

Solidarité avec le Proche-Orient, pour le meilleur et pour le pire

Ce mois-ci, notre sélection d'articles de la presse du nord-ouest de l'Europe se penche sur la réaction de l'Irlande au conflit entre Israël et le Hamas, ainsi que sur l'appel des journalistes français en faveur de leurs confrères travaillant dans la zone de guerre. Nous nous intéressons également à l'impact environnemental de l'intelligence artificielle, et à ce qu'un départ du centre politique pourrait signifier pour le Royaume-Uni.

Publié le 8 novembre 2023 à 16:27

Plus que tout autre conflit international récent, celui entre Israël et le Hamas est devenu un prisme à travers lequel se reflètent divers drames nationaux. En France et en Allemagne notamment, les responsables politiques se trouvent confrontés à une nouvelle vague d'antisémitisme, mais doivent également veiller à ce que l'expression politique des citoyens ne soit pas injustement réprimée.

Le statut post-colonial de l'Irlande, ainsi que sa relation historique avec le terrorisme, signifie que les réponses locales au conflit israélo-palestinien diffèrent considérablement de celles formulées par d’autres pays de l'UE. Lorsque Ursula Von Der Leyen a exprimé ce qui semblait être une solidarité sans réserve avec Israël à la suite des attaques du Hamas du 7 octobre qui ont tué plus de 1 400 personnes, le président irlandais Michael D. Higgins a rapidement qualifié les actions de la présidente de la Commission européenne d'"irréfléchies et même imprudentes", tandis que le Premier ministre Leo Varadkar a estimé que les commentaires de Von Der Leyen "manquaient d'équilibre". À Dublin, les bureaux de l'UE ont été brièvement occupés par des manifestants affirmant que la Commission européenne avait apporté son "soutien total" aux attaques israéliennes qui ont déjà coûté la vie à des milliers de civils palestiniens. Selon Politico Europe, ces sentiments seraient en fait partagés par de nombreux ministres des Affaires étrangères et d'autres fonctionnaires européens, préoccupés par la potentielle violation du droit international commise par Israël.


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Comme le souligne Finn McRedmond dans The New Statesman, en Irlande du Nord, "les lignes sont nettement tracées : en se promenant dans une zone unioniste, on voit des drapeaux israéliens à côté des Union Jacks ; dans les zones nationalistes, le drapeau tricolore est confortablement accroché à côté du drapeau palestinien". En effet, les républicains irlandais font depuis longtemps des parallèles entre l'exploitation coloniale britannique de l'Irlande et l'occupation israélienne de la Cisjordanie. 

Les sondages effectués en République d'Irlande indiquent que le Sinn Féin (gauche) – aile politique de l’aujourd’hui dissoute Armée républicaine irlandaise (IRA) – devrait obtenir une majorité confortable lors des prochaines élections générales du pays. Les dirigeants du parti républicain ont généralement pris soin de nettoyer la réputation de celui-ci, autrefois associée à des atrocités terroristes, notamment en édulcorant leurs propos les plus militants concernant le conflit israélo-palestinien. Cependant, on peut toujours occasionnellement trouver un conseiller du parti criant des slogans républicains militants lors de manifestations en solidarité avec la Palestine. Pour McRedmond, cette tension pourrait avoir de graves conséquences sur la neutralité de longue date de l'Irlande, que l'auteur décrit comme "voulant être membre du club avec la permission spéciale de s'en écarter", et "s'attendant à être protégée mais offrant peu en retour". 

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Tout ceci peut sembler insignifiant par rapport à la catastrophe humaine qui se déroule actuellement au Moyen-Orient. Mais en réalité, de nombreuses personnes vivant en Irlande sont directement impactées par le conflit.

Alors que les rues d'Europe et d'ailleurs se remplissent d'expressions de solidarité pour l’un ou l’autre camp, la vie dans la zone de guerre de Gaza n'est pas facile pour les journalistes non plus. Dans une lettre ouverte intitulée "Laissez-nous entrer dans la bande de Gaza faire notre métier", publiée dans le magazine français Politis, les journalistes de l’Hexagone plaident pour la protection de leurs collègues à Gaza et exigent de pouvoir faire leur travail sur le terrain.

Selon le Comité de protection des journalistes, 31 reporters ont été tués au cours de la dernière flambée de violence : 26 Palestiniens, quatre Israéliens et un Libanais. Huit journalistes ont été blessés et neuf sont portés disparus ou sont détenus. Politis, Libération et plus d'une centaine d'autres médias et journalistes français ont publié une tribune implorant le Hamas et les autorités israéliennes d'assurer une protection adéquate aux journalistes internationaux et de leur permettre d'accéder à la bande de Gaza. Le texte met en avant plusieurs cas de journalistes tués alors qu'ils rapportaient les événements, comme Ibrahim Lafi, mort le 7 octobre alors qu'il couvrait une attaque du Hamas au point de passage d'Erez, ainsi que des représentants d'agences internationales telles que l'Agence France Presse, Reuters et Al-Jazeera, touchés par des tirs d'artillerie israéliens. 


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