“La Géorgie appartient à l'UE et les Géorgiens appartiennent à l'UE” déclarait
la ministre fédérale allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock lors de sa visite en Géorgie en mars 2023, soutenant ainsi ouvertement la demande du pays dans l'obtention du statut de candidat à l'Union européenne. Le déplacement de la ministre avait pour but de promouvoir les échanges directs entre les deux pays et de renforcer leur coopération, mais aussi de soutenir la Géorgie, à la fois dans ses démarches d'adhésion à l'UE et à l'OTAN et dans les réformes que ces demandes imposent.
Suite au rejet de sa candidature par la Commission européenne en 2022, cette visite a donné au peuple géorgien une opportunité d'espérer qu'il parviendra, cette fois-ci, à franchir les étapes qui le séparent de l'Union.
Qui veut adhérer à l’UE, et pourquoi ?
La majorité des Géorgiens souhaitent adhérer à l'UE, comme le révèlent différentes études : un sondage du mois de mars, réalisé par l'International Republican Institute (IRI), révèle par exemple que 89 % de la population soutient l'adhésion à l'UE et que 80 % souhaitent également rejoindre l'OTAN. Le peuple géorgien a par ailleurs fait entendre sa voix à maintes occasions, notamment au mois de mars 2023, lors des manifestations contre la loi sur les "agents étrangers", un texte visant à cataloguer de la sorte les médias et les organisations non gouvernementales financées à hauteur de 20 % par des sources étrangères.
Le mois de juin 2022 avait vu défiler, lui aussi, un nombre record de manifestants (estimé entre 120 000 et 160 000 personnes) scandant le slogan "Home to Europe" ("L'Europe, notre maison") en signe de protestation contre le rejet du statut de candidat à l'UE.
L'indignation populaire s'est à nouveau exprimée lorsqu'en mai 2023, la fille de Sergueï Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, s'est rendue en Géorgie pour assister au mariage d'un proche. De vives tensions entre la police et des activistes ont alors éclaté, entraînant l'arrestation de politiciens de l'opposition et de manifestants, ainsi que l'annulation de la réception prévue après le mariage.
La visite de la famille Lavrov et la contestation populaire faisaient suite à la reprise de vols commerciaux entre Tbilissi et Moscou, une mesure approuvée par le gouvernement géorgien. Les vols entre la Russie et la Géorgie étaient alors interdits depuis 2019, décision prise par Vladimir Poutine en réaction à une violente protestation populaire contre la visite d'un député russe au Parlement géorgien.
En plus de la reprise des vols, le président russe a également annoncé en mai 2023 la levée de l'obligation de visa pour les citoyens géorgiens, leur permettant ainsi de séjourner en Russie pendant 90 jours (à l'instar des pays européens, où ils peuvent voyager avec les mêmes conditions et pour la même durée depuis 2017). Or, ces décisions pourraient à nouveau compromettre l'obtention du statut de candidat de la Géorgie.
En effet, le 29 mai 2023, l'UE a envoyé une note diplomatique au gouvernement géorgien faisant part de son inquiétude quant à la réouverture des lignes avec la Russie. L'ambassadeur de l'UE, Pawel Herczyński, a alors déclaré que l'UE regrettait l'accord donné par le gouvernement géorgien à la reprise des vols, le mettant en porte-à-faux vis-à-vis des 27 Etats membres. Ce n’était pas la première fois que les pays de l'UE avertissaient officiellement la Géorgie – cela avait déjà été le cas en février 2023, lors de l'emprisonnement du troisième président géorgien Mikheïl Saakachvili.
Une condition sur douze de remplie
Au cours des douze derniers mois, la Géorgie s'est vue sommée de se soumettre aux douze priorités recommandées par la Commission européenne en juin 2022. Celles-ci englobent divers changements et réformes dans des domaines variés tels que la réforme judiciaire, la "désoligarchisation", la lutte contre le crime organisé, l’amélioration du paysage médiatique, la gestion de la polarisation politique et la nomination d'un défenseur public indépendant.
Selon un document rédigé par plusieurs ONG, sur les douze conditions recommandées, la Géorgie n'en a pleinement rempli qu'une seule et a presque satisfait à deux autres; il lui reste donc neuf questions à traiter, et peu de temps pour ce faire, la Commission européenne comptant publier un rapport officiel sur l'élargissement de l'UE à l'automne. Rikard Jozwiak, éditeur en charge du Bureau européen de Radio Liberty, affirme que la Commission européenne soutiendra cette année la recommandation d'accorder le statut de candidat à la Géorgie.
La seule et unique solution
Pour les Géorgiens, le statut de candidat et l'adhésion à l'UE et à l'OTAN ne sont pas de simples lubies : au contraire, ils incarnent l'unique moyen d'assurer la sécurité du pays. Nul n'ignore que 20 % du territoire géorgien est toujours occupé par la Russie, ce qui constitue un vrai défi pour sa sécurité.
L'adhésion à l'UE et à l'OTAN revêt une signification encore plus particulière pour le peuple géorgien depuis le début de la guerre en Ukraine. Qui plus est, la Géorgie se démène activement pour tenter d'intégrer l'UE, et ce depuis qu’elle a saisi son indépendance en 1991. Cet axe européen est même inscrit dans sa constitution, mettant en évidence son orientation pro-occidentale.
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