Manifestation en faveur de Mir Hossein Moussavi à Francfort, Allemagne, le 16 juin 2009 (AFP)

L'Iran, un sujet embarrassant

La presse européenne s'interroge sur la prudence des réactions de l'Union face à la crise iranienne, suite à la réélection contestée de M. Ahmadinejad. La raison est à chercher du côté du partenariat économique qui lie le continent à l'Iran, souligne plusieurs quotidiens.

Publié le 18 juin 2009 à 13:49
Manifestation en faveur de Mir Hossein Moussavi à Francfort, Allemagne, le 16 juin 2009 (AFP)

Les réactions européennes aux événements en Iran, comme dans la plupart des pays occidentaux oscillent entre "l'espoir d'un chamboulement politique historique du pays" et "le souci de ne pas saborder" (…) l'ouverture diplomatique de ces derniers mois vis-à-vis de Téhéran, constate Le Monde. Ainsi, les déclarations officielles en Europe demeurent prudentes. Sauf de la part du président français. En déclarant notamment que "ces élections sont une nouvelle exécrable", Nicolas Sarkozy semble vouloir "couper définitivement les ponts avec M. Ahmadinejad", estime le quotidien français.

Rome s'est quant à elle limitée à critiquer "les violences inacceptables" en Iran, sans faire référence aux soupçons de fraude électorale. Mais c'est le Royaume-Uni qui s'est montré le plus circonspect. En disant que "les élections sont du ressort du peuple iranien", Gordon Brown a semblé appeler les partenaires occidentaux à une certaine retenue. "Une inflexion notable, dans la mesure où le Royaume-Uni, avec la France, se positionne généralement sur une ligne 'dure' à propos du dossier nucléaire", souligne Le Monde.

"On souhaiterait une Union européenne qui condamnerait la situation à Téhéran avec plus de clarté, plus de force et plus de crédibilité", critique le Kurier de Vienne d'autant que les "jeunes adversaires d’Ahmadinejad comptaient sur plus de soutien moral de l’extérieur". Le quotidien roumain Ziuajuge au contraire les réactions de l’UE "sans équivoque". Du moins, en comparaison à ses réactions timides face aux événements similaires survenus en Moldavie, après les élections législatives du 5 avril dernier. Dans les deux cas, les pays sont dirigés par un régime "dictatorial" et les manifestations qui contestent des résultats truqués ont fait plusieurs morts. L'explication, suggère le quotidien, réside probablement dans le fait que l'Iran "avec des ressources de pétrole et de gaz est un bon partenaire économique, tandis que la Moldavie est un des plus pauvres pays du monde".

De fait, comme le souligne le Tagesspiegel, l'Allemagne est le deuxième partenaire économique de l'Iran après la Chine. Selon un entrepreneur allemand interviewé par le quotidien berlinois, cela justifie que le pays ne condamne pas ouvertement contre le régime. "Nous sommes désavantagés. S’il doit y avoir des sanctions, elles devraient émaner des Nations unies".

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Les PME allemandes doivent faire preuve de responsabilité et mettre un terme à leurs relations avec l’économie iranienne, propose au contraire le Financial Times Deutschland : "C'est la clef pour un arrêt du programme nucléaire iranien. (…) 75 % des PME iraniennes sont équipées en technologie allemande". La crise politique en Iran pourrait rejaillir sur les entreprises d’énergie européennes, constate de son côté le quotidien économique allemand Handelsblatt. L’enjeu est de taille. Le plus grand projet énergétique du monde se trouve sur le champ iranien de "South Pars" dans le Golfe persique. Valeur d’investissement : 4,7 milliards d’euros. Les Français de Total sont intéressés, aussi bien que la néérlando-britannique Shell et l’espagnol Repsol. Suite aux menaces de sanction américaines, ces derniers comme les Allemands de RWE et Eon ont pris leurs distances avec leurs projets en Iran. "Mais de son côté Téhéran augmente la pression. Son ministre du pétrole menace d'attribuer des marchés aux concurrents plus consentants, tels que la Chine ou la Russie."

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