"T’as un grand-père ? Envoie-le à Bruxelles" ("Hast Du einen Opa, schick ihn nach Europa"), disent les Allemands pour parler des vieux routards de la politique qui sont nombreux à remplir les rangs du Parlement européen. Ils n’ont pas tort. Après tout, il paraît que "vieillesse" rime avec "sagesse". Les Espagnols confirment : ceux qui appellent leurs retraités "jubilado" (même racine que "jubiler"), disent aussi "Sabe más el diablo por viejo que por diablo" : mot à mot, "le diable est savant parce qu'il est vieux, pas parce que c'est est un diable". En somme, "ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces".
Entre les rangs des eurodéputés, l’ambiance peut vite tourner au vinaigre, surtout si l’on met à côte à côte Français, Anglais et Italiens : outre-Manche, l’expression "to teach one’s grandmother to suck eggs" permet de faire comprendre à un voisin de pupitre un poil trop pédagogue, que merci, oui, on a bien compris ("tu es en train d’apprendre à une grand-mère comment gober des œufs"). Les Français, terre à terre, arrêtent tout net les discours qui sentent le mensonge à plein nez : "Faut pas pousser mémé dans les orties". Comme le fait d’ailleurs l’expression italienne "Mia nonna in carriola" ("et ma grand-mère dans un fauteuil roulant"). Tandis que l’allemand, expéditif, opte pour "Das kannst Du Deiner Großmutter erzählen" ("Je ne te crois pas, va dire ça à ma grand-mère").
En Europe, tout le problème est de réduire les écarts entre les riches et les pauvres. En voilà une belle mission pour nos retraités de la politique nationale qui se baladent entre Bruxelles et Strasbourg. Entre les "babcią klozetową" polonaises, ces grands-mères "dames pipi" qui empêchaient, à l’époque communiste, qu’on vole le papier des toilettes publiques, les clochards "dziadować" (même racine que le mot "dziadek" qui signifie " grand-père") et les "silversurfers", il y a un monde de différence. Car oui, il y a des anciens aux cheveux d’argent ("silver") qui surfent sur le Web. Alors que fait l’Europe ?
Aneta Marciniak. Traduction Jane Mery