investigation Reportage En eaux troubles |partie 4 : Le bio
Le jardin de Joke Wierenga, à Zwolle (Pays-Bas). Les fleurs sauvages permettent la prolifération d’un grand nombre d’insectes et améliorent la pollinisation. Photo : Jelena Prtorić Joke garden meadow flowers

Retourner vers la communauté: une porte pour sortir de l’agriculture intensive aux Pays-Bas

Lorsque les terres sont rares et chères, c’est l’efficacité et la productivité de l’agriculture qui priment. Malgré leur petite superficie, les Pays-Bas sont une des plus grandes puissances agricoles au monde, et l’agriculture biologique y reste rare. Mais des gestions communautaires plus petites et vertueuses pourraient bien avoir un rôle à jouer dans l’émergence de nouveaux modes de productions agricoles.

Publié le 29 mars 2023 à 17:45
Joke garden meadow flowers Le jardin de Joke Wierenga, à Zwolle (Pays-Bas). Les fleurs sauvages permettent la prolifération d’un grand nombre d’insectes et améliorent la pollinisation. Photo : Jelena Prtorić

Dans le pays de l’agriculture intensive, Joke Wierenga fait figure d’exception. Sa petite exploitation aux abords de la ville de Zwolle, dans l’est des Pays-Bas, ne mise pas sur les subventions ou les produits chimiques pour améliorer son rendement. À la place, la communauté locale lui vient en aide et les habitants participent activement à la plantation. 

Les gens paient leurs produits à l’avance, et me font ensuite confiance en tant qu’agricultrice ; ils savent que je ferai de mon mieux pour que les récoltes soient à la hauteur de leurs attentes”, explique-t-elle. 


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Wierenga était professeur de sciences et de mathématiques jusqu’à ce qu’elle visite un jardin urbain il y a 7 ans et décide de se lancer elle-même dans l’agriculture. Elle gère désormais un jardin maraîcher, un mode d’agriculture respectueux de l’environnement, et cherche à améliorer ses rendements en proposant un roulement fréquent de ses productions et une large gamme de cultures différentes. Dans la plupart des exploitations similaires, les producteurs vendent directement leurs produits au consommateur lorsqu’ils le peuvent. Un système éprouvé, comme l’explique Wierenga : La tradition des jardins maraîchers remonte au Moyen Âge, lorsque la nourriture était produite autour des villes. Avec l’augmentation de la population et le développement de techniques agricoles, les productions se sont éloignées des centres urbains, et le système de culture s’est grandement mécanisé afin de permettre de plus grands rendements et de nourrir toujours plus de personnes.

De telles cultures maraîchères ont pour but de rapprocher à nouveau la production de nourriture de la population. Chaque semaine, Wierenga informe les clients de l’avancée des récoltes, et ceux-ci peuvent ensuite venir et ramasser leur part. Certains d’entre eux se portent volontaires et aident à planter et à désherber. Ce système confère aux petits exploitants la sécurité dont ils ont besoin pour survivre.

joke wierenga garden -photo Jelena Prtorić
Joke Wierenga, dans son champ aux abords de la ville de Zwolle, aux Pays-Bas. Août 2022. | Photo : Jelena Prtorić

Un agriculteur est exposé à nombre de risques en matière de rendements”, précise Wierenga. “Dans un ‘système agricole communautaire’, les consommateurs sont membres du potager pour un minimum d’un an, et partagent ainsi ces risques avec l’agriculteur. Le fait que les membres paient d’avance assure aussi la stabilité de revenu. “Je connais déjà en mars le montant de mon salaire, et ça fait toute la différence.” 

Construire une communauté 

Louées pour seulement 1 000 € par an, les terres de Wierenga appartiennent au gouvernement. Aujourd’hui, la communauté de l’agricultrice compte 100 membres, et grâce à l’argent des adhésions ainsi qu’aux activités d’éducation qu’elle organise dans sa ferme avec des écoles, elle est en mesure de se dégager un salaire annuel d’environ 15 000 €. Seulement, elle n’a aucune garantie quant au nombre d’années qu’elle pourra passer à travailler sur cet emplacement. Les autorités locales souhaitaient initialement y construire des habitations, mais les habitants locaux, opposés à une telle démarche, ont voulu préserver l’un des rares espaces verts du coin.


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En août 2022, sa ferme est en fleur ; on y trouve des courgettes, des courges et des choux, qui n’attendent que d’être cueillis. On y trouve aussi des arbres fruitiers et des buissons couronnés de baies rouges et violettes. La mise en terre, le désherbage et les récoltes sont faits à la main, et Wierenga tâche de garder les parcelles d’herbes hautes et des fleurs intactes pour les abeilles, papillons et autres insectes. Elle n’utilise ni pesticide ni engrais synthétique, et fait pousser ses légumes en respectant les normes imposées à un agriculteur biologique, sans pour autant en posséder le statut. “Il faut payer pour obtenir la licence. Même si le prix n’est pas élevé, c’est plus de travail administratif. De plus, la grande variété de sa production ajouterait encore à la complexité. “Je veux expérimenter avec plusieurs sortes de légumes. J’ai tellement de variétés d’arbres et d’arbustes différents qu’il serait vraiment difficile d’essayer de tout cat…

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