Nous n’en sommes pas encore à la moitié de l’année, mais je peux déjà dire que 2022 ne correspond ni à mes attentes, ni à mes espoirs. Cette année, le Covid-19 n’est plus le “grand disrupteur”, étant donné que la plupart des gouvernements ayant mis fin à la l’essentiel des mesures de lutte contre le virus et que nous nous sommes plongés dans ce “monde d’après” tant espéré. Tout cela se serait sans doute produit sans la (ré)invasion de l’Ukraine par la Russie, mais cette guerre a certainement contribué à redéfinir l’état d’esprit et les priorités de la plupart des Européens. Et s’il est également vrai que l’illibéralisme est devenu la préoccupation première de l’UE, surpassant même le Brexit, il s’agit davantage d’un problème de politique extérieure que de politique intérieure, qui concerne bien plus la Russie de Vladimir Poutine que la Hongrie de Viktor Orbán ou la Pologne de Jarosław Kaczyński.
La (ré)invasion de l’Ukraine par la Russie marque la cinquième crise politique du 21e siècle, après le 11-septembre, la crise économique mondiale de 2008, la crise des réfugiés de 2015 et la pandémie de Covid-19. En gros, une crise tous les cinq ans ! La guerre en Ukraine a tout du moins reporté le solde politique de la pandémie. Il s’agit sans doute de la crise politique la plus importante de ce début de siècle, qui surpasse peut-être même le 11-septembre. Elle a déjà affecté certaines certaines élections nationales clé en Europe, et a ironiquement bénéficié à Viktor Orbán en Hongrie et à Emmanuel Macron en France. Cependant, si Orbán a réalisé un meilleur score que Macron lors d’élections certes libres mais injustes, c’est bien le président français qui en sort grand vainqueur au niveau européen.
Le raz de marée électoral d’Orbán a créé la surprise chez ses amis et ses adversaires. En monopolisant la plupart des médias d’Etat, l’opposition ayant à peine obtenu cinq minutes de temps d’antenne pendant la campagne électorale, il a fait de la guerre en Ukraine un atout plutôt qu’un handicap, en se présentant comme un dirigeant fiable et stable, capable de maintenir son pays en dehors de la guerre et les prix l’énergie à un niveau bas.
Mais si cette position “neutre” a bien fonctionné au sein du pays, où les médias privés contrôlés par son parti, la Fidesz, tout comme les médias publics ont tenu une ligne ouvertement pro-russe, elle le dessert à l’extérieur, en l’isolant de plus en plus du reste du monde. Après avoir perdu le dirigeant tchèque Andrej Babiš lors des législatives de 2021 et le chancelier autrichien Sebastian Kurz, victime d’un scandale politique, Orbán pourrait bientôt perdre un autre allié, le Premier ministre Janez Janša, qui a perdu les élections en Slovénie le mois dernier.
Mais surtout, la guerre en Ukraine a accentué la fracture de l’alliance entre Budapest et Varsovie, qui constitue le cœur du front illibéral au sein de l’UE. Alors que de nombreux commentateurs se plaisent à souligner le soutien de l’extrême droite à Poutine – moins virulent que celui de l’extrême gauche, il faut le dire – la guerre ne peut pas pour autant être qualifiée de division entre “le courant dominant” et les “populistes”. En réalité, au sein du Conseil européen, les plus forts opposants et partisans de Poutine sont des populistes (d’extrême droite), issus respectivement du parti politique polonais Droit et justice (PiS) et de la Fidesz. Au cours des derniers mois, Orbán a manqué plusieurs événements pro-Ukraine organisés au niveau régional, tandis que le groupe de Visegrad semble ne plus fonctionner qu’à trois, puisque la République tchèque, la Pologne et la Slovaquie ont refusé d’assister à une réunion des ministres de la défense du V4 pour protester contre la position pro-russe de la Hongrie.
À présent que la politique étrangère prend le pas sur la politique intérieure, la nouvelle mise à l’épreuve de l’Europe pourrait bien résider dans l’adoption d’une attitude antirusse plutôt que dans le respect des institutions et des valeurs de la démocratie libérale
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